A un peu plus d'une année et demie de la fin de son mandat, le président Bouteflika voit l'une de ses plus grandes promesses de campagne sérieusement compromise. En effet, il est vraiment loin du million de logements qu'il avait fait miroiter aux Algériens vers 2009. Et c'est le ministère de l'Habitat qui évente ce bilan du reste attendu. En l'état actuel des choses, seuls 393 341 logements ont été réalisés si tant est qu'on pouvait faire confiance aux statistiques officielles, souvent très en avance sur la réalité. Pour cause, le ministre de l'Habitat, Noureddine Moussa, qui a réuni hier les directeurs des OPGI, a annoncé la mise en place « prochaine » au sein de son département d'un service d'audit chargé de la vérification et de la validation des chiffres qu'avancent les Offices de promotion et de gestion immobilières sur l'état d'exécution de leurs programmes de logements. Il y aurait, tout compte fait, tromperie sur la marchandise dès lors que le ministre doute des chiffres communiqués par ces organismes. Il estime la mise en place de cette instance « nécessaire » ne serait-ce que pour « préciser la terminologie utilisée en matière d'évolution de la réalisation des programmes pris en charge par ces structures, c'est-à-dire faire une claire distinction entre un logement réalisé et un autre livré. » M. Moussa suggère ainsi que ces organismes confondent assez souvent entre un logement réalisé et celui livré effectivement au bénéficiaire. La différence est d'autant plus grande que des milliers de logements prétendument achevés, mais non viabilisés, grossissent le parc immobilier national au moment où les citoyens crient à la crise du logement. Aussi, les nouveaux logements sont dans la plupart des cas dépourvus des structures d'accompagnement, voire du minimum de conditions vitales comme le gaz et l'électricité. Mais officiellement, on se suffit du chiffre pour lui faire jouer la fonction politique avec le zélé de la télévision nationale qui transforme ces attributions de logements comme de véritables carnavals. Le nouveau ministre de l'Habitat veut apparemment opter pour la vérité des chiffres, histoire de rompre avec la gestion politique d'un dossier aussi sensible électoralement. M. Moussa a annoncé également que sa structure d'audit aura pour autre mission de vérifier la concordance des différents chiffres et autres données signalés par les différents OPGI. Ceci pour la crédibilité des statistiques. S'agissant de la gestion du parc de logements relevant des OPGI, soit 753 000 unités, le ministre a eu à entendre un constat des plus décourageants pour son secteur. Environ la moitié des locataires de logements gérés par les OPGI ne paient pas leur loyer ! « Le taux de recouvrement des créances par les OPGI ne dépasse pas les 50% », a admis M. Moussa. Pourquoi ces organismes publics peinent-ils à faire payer leurs locataires ? Le ministre pense que cela est dû au « déficit de canaux de communication et de dialogue entre les locataires et les offices immobiliers ». Pour y remédier, il a appelé les responsables de l'ensemble des OPGI à créer des cellules de rapprochement avec les citoyens pour la vulgarisation des textes et lois en vigueur. Cela étant dit, cette réunion de deux jours qui devrait faire l'état des lieux aura permis de mettre le doigt sur la plaie dans un secteur hermétiquement fermé durant le long passage de Mohamed Nadir Hamimid. Les retards incommensurables qu'accusent les projets AADL et l'état de délabrement des logements réalisés par cette agence confirment l'absence de suivi en dehors des échéances politiques. M. Moussa aura eu le mérite de laver son linge sale en public… Il est à noter enfin qu'une réunion d'évaluation sera tenue avec les responsables de l'AADL, demain au siège du ministère.