Sur La Rambla de Sant Josep Rebeca, un violoncelle entre le genou et le bras gauche, exécute avec brio un air argentin « c'est du tango, senor ! » Barcelone : De notre envoyé spécial Un tango se danse à deux semble-t-il mais ; quand on n'a pas de partenaire, on fait dans le « deux en un » . De toute façon, le brassage des cultures, de nos jours permet une musique du genre tango avec une danse raï. Pourquoi pas ? Et dans le pays de Laura, fille de Cervantes, rien n'est idiot. Sur La Rambla de Sant Josep (attention, on est en Catalogne) Rebeca, un violoncelle entre le genou et le bras gauche, exécute avec brio un air argentin « c'est du tango, senor ! » m'informe-t-on. Qu'à cela ne tienne… Du moment que ça tangue de partout. Les touristes, intrigués par cette innovation, s'agglutinent et forment une halqa. Certains, amusés ou solidaires, tapent des mains. Une cadence démesurée qui me déséquilibre. Je me ramasse avec mon corps frêle, avant l'exécution d'un long déhanchement. « Olé ! Olé ! » crie la foule. Pourtant, ce n'était pas une corrida. Ah, ces Ibériques ! Le son du violoncelle s'était estompé depuis un moment déjà, mais je continuais mon tango-raï. J'étais induit en erreur par l'accompagnement des applaudissements à tout-va ! Puis, des pièces commençaient à pleuvoir sur le pavé. « Senor, tienes autorizacion para cantar y bailar en lugares publicos ? » (monsieur, avez-vous une autorisation pour chanter et danser dans les lieux publics ?), m'interrogea un élément de la guardia civil, une main me tenant par le col, pour m'empêcher de fuir. Je lui expliquais que je ne faisais que m'éclater et que je n'allais pas ramasser les pièces. La foule réagit en intervenant auprès de mes futurs geôliers. « dejale ! dejale ! Y viva Sancho Panza ! (laissez-le ! laissez-le ! et vive Sancho Panza !). Il ne manquait plus que ça… Je n'étais pour rien dans ce trouble à l'ordre public. J'exhibais mes papiers en règle « Faut-il aussi un visa pour danser ? » demandais-je. « Un tango la panza, un tango ! » La foule, enragée, veut du spectacle. Me mettre en spectacle. Rebeca se leva et me remercia avec un sourire. Je me frayais difficilement un chemin dans la cohue et je disparus. Il est vrai que le congrès sur les droits humains au Maghreb m'attendait au siège de l'Institut européen de la Méditerranée… Et rien ne vaut un tango raï au pays de Juan Carlos, avant un débat sur les Maghrébins à Barcelone…