On ne trouve pas pareille affluence ailleurs, surtout le soir. Pas besoin d'attendre un hypothétique bus ou de faire la marche : les Babelouediens vont à R'mila ou à El Kettani et y restent jusque tard dans la nuit. Sauf qu'à la plage R'mila, l'affluence est moins nombreuse qu'à El Kettani dont elle est séparée par des galets rocheux. Les familles préfèrent venir le soir de ce côté de l'esplanade. La discrétion leur est assurée : il s'en trouve, d'ailleurs, qui font leur prière sur la plage. Elles peuvent aussi se défouler pour pas un rond ou presque. La chaise est cédée à 20 dinars alors que le parasol l'est à 100. Mais, qui en a vraiment besoin la nuit ? Pour ceux qui veulent faire une tournée en mer, il est permis de louer les services des pêcheurs dont les embarcations se trouvent au pied du mur de soutènement de la plage. « Il leur est exigé la somme de 20 DA par personne », assure un jeune qui vend des jus fait à la maison et des cacahuètes et du thé dont raffolent, à cette heure de la nuit, les familles. Ils sont nombreux ceux qui s'adonnent à ce « commerce juteux ». Leur âge ne dépasse pas 30 ans. Plus loin, se trouve l'esplanade du Millénaire qui grouille d'une foule heureuse. Un opérateur a installé des manèges depuis plus de trois ans. Le succès fut immédiat. « Il n'en fut pas toujours ainsi ; mais passé quelques mois, le propriétaire a décidé de travailler même pendant les autres jours de l'année, l'affluence ne faiblit toujours pas », soutient un jeune qui a pris pied dans cet espace. Les prix affichés ne laissent pas de convaincre les pères de famille. Tous les manèges sont à 20 da, excepté les tamponneuses et le karting où l'on doit débourser 40 da. Un jeune s'est attiré les faveurs des férus de manèges. Sassi est son nom et il est connu des familles dont certaines sont ses voisins de quartier. La sacoche remplie de polaroids en bandoulière, ce Babelouedien pur jus, est propriétaire d'un poney qu'il a affublé du nom de Skoud. « J'ai pris la place d'un jeune originaire de Ouled Fayet qui a fait l'unanimité contre lui. J'ai pris contact avec le P/ APC de la commune de Bab El Oued qui m'a fait signer un contrat dans lequel je m'engage à garantir la sécurité et préserver la propreté des lieux. Chose faite, puisque j'ai installé des bacs et un long parasol où peuvent s'abriter les passants. »Une tournée sur le dos de Skoud est proposée à 50 da. « J'aurais aimé proposé des prix meilleurs mais compte tenu de mes charges, ce n'est pas possible », soutient-il en assurant qu'il doit louer un particulier qui ramène le poney au Caroubier. Se reprenant, il assure qu'un tel animal se vend « à plus de 40 millions de centimes. Je propose également des photos aux familles contre le paiement d'une somme de 150 dinars ». D'autres commerces se sont greffés à l'espace réservé aux manèges. On y aperçoit, d'ailleurs, des vendeurs de barbe à papa et autres amusements. Ceux qui maquillent les enfants ont senti aussi le filon. Pour 50 da. « On ne peut pas venir ici sans solliciter ce peintre en herbe », relève un père de famille en voyant sa fille entre les mains expertes de ce jeune. L'hôtel d'El Kettani, imposant immeuble, lui, se morfond sans que les autorités interviennent. Les estivants, pourtant nombreux dans cet axe, boudent la terrasse aménagée en face de la mer qui n'accueille plus la foule des grands jours.