Cheba Faïza qui se produit pour la première fois sur la scène du Théâtre de Verdure aura été sans conteste la révélation de la 4e soirée du Festival du raï qui se poursuit avec une affluence de plus en plus nombreuse. Mission impossible, le titre de son premier album sorti en 2005 et qu'elle a interprété à l'occasion, attire l'attention par sa qualité musicale. A l'aise dans son ensemble noir, Faïza est loin d'être une débutante en chantant : « Yeâchak fiya / imout âliya, (il m'aime/il est fou de moi). » Et sa « mission » a été plutôt accomplie. Lui rappelant sans doute des années fastes, le guitariste Kada Naoui qui, à quelques exceptions près, son instrument étant étouffé par les claviers de l'imposant mais talentueux Amine Dehane, se contente souvent d'un accompagnement, s'est, avec elle, quelque peu éclaté. Mais le public n'est intéressé que par le rythme et cette chanteuse sans âge qui a su se donner jusqu'aux imites de ses capacités vocales en enchaînant sur un titre de son 2e et dernier album : Djlali malah (dans le sens de salé). Sollicitée en aparté, la chanteuse n'a rien voulu dire sur ses deux prochains albums qu'elle compte sortir à la rentrée. « Je ne dirai pas un mot sinon on va me pirater », confie-t-elle. Les vases du raï sont tellement communicants que les contenus musicaux et textuels semblent être définitivement mis en commun. Après le passage de deux jeunes chanteurs de la catégorie amateur, concernés par le concours, Mohamed et Bilal Seghir dont la prestation a été à la hauteur, le festival, comme il nous a habitués tous les soirs, a accueilli un artiste de la vieille école. Hoine Chabati (référence à Chabat), pas très connu mais, très classique dans sa tenue et sans fioritures dans sa voix, était venu rafraîchir la mémoire d'une génération qui s'est délectée de ce que lui qualifie de « vrai raï ». Par cela, il entend les musiques (accordéon) avec lesquelles il s'accompagnait à ses débuts, « en 1977 », précisera-t-il. Son effacement de la liste raï est dû selon lui au fait que ses éditeurs lui ont conseillé de se consacrer au style wahrani (Blaoui, Wahbi) ou à la poésie dite chiir el bédoui. De ses 30 produits sur le marché, il évoque Zayaret el wali (visite du saint) ou Eddini nzour nebra (solliciter le saint pour guérir). Cet attachement à la tradition est bien mis en évidence dans sa prestation sur scène en évoquant d'emblée Sidi El Houari, le saint patron de la ville. Cheb Kadi, qui lui succède, chante bien Impossible nensa lpassé mais un passé très récent et s'il cite Houari, c'est un clin d'œil au bassiste qui remplace Dida (du groupe Liberté) devenu momentanément directeur artistique. Mais chez cheb Kadi, on découvre aussi une certaine nostalgie en choisissant d'interpréter Rouhi Ya Ouahrane de cheb Khaled datant de la fin des années 1970 débuts 1980. Classé à part et dont le nom est associé au regretté Rachid Baba Ahmed qui a fait sa carrière, cheb Anouar est un des nombreux fidèles de cette manifestation. Aujourd'hui adulte, il a su survire à la mutation de sa voix que le public lui connaissait quand il n'était encore qu'un enfant adulé. Mon premier amour, Achkak fi galbi / Amour secri (Ton amour est dans mon cœur / Amour secret) est l'un de ses titres interprétés mais c'est avec le genre saf et son rythme cadencé qu'il a séduit le plus. Ensuite, alors que le public attendait certainement Redouane annoncé pour cette soirée, Hasni Seghir a fait intrusion. Nezdam (je fonce) sans voir, chante-t-il, un coup de poker qui lui a bien réussi car avec lui, la nuit s'annonçait encore plus longue. Il était plus de minuit quand il a entonné N'tiya hia la princesse / nebghik à vie / âchkek fi galbi megravi, un passage qui sonne comme une sérénade mais dans un univers raï qui est très loin de croire aux contes de fées. Cheb Kader, qui lui succède, a lui aussi voulu perpétuer la mémoire de Hasni en interprétant Tal ghiabek ya ghezali. Le tube haba numérique, malgré une concurrence presque sauvage, a été un énorme succès à sa sortie. Il a propulsé Redouane sur le devant de la scène et le succès a été tel que ce chanteur semble ne plus vouloir s'en départir. La ressemblance musicale de ses autres titres est frappante, un moule qui fait recette et le public en redemande.