El Kala est de ces régions sur qui pèse un danger réel. Il s'en est trouvé ceux qui ont pris la défense de ce parc situé en grande partie dans la wilaya frontalière d'El Tarf. Y figurent plusieurs défenseurs de l'écologie, à l'instar de Nicolas Hulot. Ce remue-ménage ne semble pas décider les autorités à abandonner leur projet ou du moins apporter les rectificatifs nécessaires. Les zones humides d'El Kala reconnues d'importance mondiale figurent sur la liste des zones répertoriées par la convention de Ramsar, à laquelle l'Algérie a adhéré en 1982, soit une année avant la création du parc. Pour les protestataires, le passage du tracé dans 3 zones de classes IV et 4 zones de classe III est « dangereux ». « L'option de le faire passer par Bouhadjar est à même de préserver l'environnement. Les surcoûts prévus ne sont pas très importants », soutiennent-ils. Ce contournement obligerait l'Etat à des dépenses supplémentaires. Pas moins de 200 millions de dollars seraient « gaspillés » dans le cas où les autorités décident à contourner par la région Bouhadjar. Les Tunisiens doivent réaliser 25 km de tunnel et payer 250 milliards de dinars dans le cadre de l'autoroute transmaghrébine. « On doit faire l'économie de ces coûts supplémentaires », relève Hallis. « Ceux qui sont partis en guerre contre le projet font remarquer que les autorités ne font pas trop cas de l'environnement. Les surcoûts ne sont pas d'une grande importance », soutien-t-il en affirmant que la Banque mondiale (BM) a financé un plan de gestion sous la forme d'un don de 10 millions de dollars mais seulement 60% de ce don furent consommés. Des populations qui s'y sont installées rendent difficile tout projet touristique viable. « Des extensions urbaines furent réalisées sans que les détracteurs s'y opposent, alors qu'ils pouvaient le faire », soutient-on. Il n'est, pour lui, qu'à voir les décharges sauvages : plus d'une dizaine s'y trouvent. Le tracé de 15,5 km ne représente que 0,02 de la totalité de la superficie du parc (800 km2). Plusieurs variantes furent proposées dans ce lot Est de l'autoroute. La variante initiale se trouvant à la limite des lacs fut abandonnée au profit de deux autres. Adoptées lors d'un conseil interministériel (CIM), celles-ci prévoient le passage de l'autoroute à des distances plus grandes des deux grands lacs : Oubeira et Tonga. Les deux variantes furent soumises à l'étude mais celle qui fait l'unanimité est la première. Faisant la jonction avec la RN44 qui traverse le parc, elle se situera à 1,7 km du lac Oubeira et à 4 km du lac Tonga. « L'autre variante, c'est-à dire la deuxième, ne sera visiblement pas adoptée. Elle est plus coûteuse et portera atteinte à des infrastructures se trouvant sur son parcours. Cette variante, plus au sud, qui prévoit la réalisation d'un tunnel de 32 km, nécessitera 150 millions de dollars et 40 mois de travaux », assure un consultant. L'étude d'impact concernant le passage de l'autoroute par le parc d'El Kala a été finalisée au mois de janvier 2007. Réalisée par un bureau d'études japonais, le consortium algério-japonais (Cojaal), elle a été validée par un bureau d'assistance canadien Dessau Soprane. Des mesures y ont été prévues. Hallis qui y a participé fera remarquer qu'il importe de traiter les eaux de chaussée « de telle sorte qu'elles n'infectent pas les eaux du lac, de protéger aussi des bruits en aménageant des haies sur tout le parcours du tronçon ». Ces assertions ont été battues en brèche par les détracteurs. Pour eux, plusieurs hectares ont été détruits et « ce projet » ne mettra que davantage en péril le parc. La RN44 qui traverse le parc et les populations qui s'y trouvent font que le lac des oiseaux a perdu de son importance et n'est « qu'une simple retenue ». Les études soutenues par les Japonais prévoient également de planter des talus et d'aménager des passages pour la faune et le bétail. Le cerf, menacé de disparition, serait ainsi protégé, relève Hallis. « Rien n'est moins sûr », relèvent les détracteurs. D'autres raisons liées à la politique « de bon voisinage » dicteraient l'option de ce tronçon. L'autoroute rejoindra la frontière tunisienne à un point que les Algériens ne doivent pas mettre sous le coude. Des accords ont été signés entre les gouvernements algérien et tunisien. Une étude préliminaire a été actualisée par la SETA et remise à l'Agence nationale des autoroutes (ANA) en 2002. La commission algéro-tunisienne, qui a été créée par la suite, s'en est inspirée. « Cette commission a statué sur le passage de l'autoroute entre Mexa et Roum el Souk du côté algérien et Hammam Bourguiba du côté tunisien. Ne pas s'y soumettre, équivaut à ne pas tenir nos engagements envers nos voisins. L'autoroute, dans le tronçon qui nous concerne, rejoindra la route du sud tunisien », soutient M. Soltani, directeur des travaux publics de la wilaya d'El Tarf.