La wilaya d'El-Tarf, située à l'extrême est du pays, accueille chaque année en période estivale entre trois et quatre millions de touristes. Il n'en demeure pas moins que l'infrastructure d'accueil demeure en deçà de la demande. Cette ville frontalière n'a réalisé qu'un seul hôtel : El-Mordjane, style Pouillon, exploité par un privé en location. Ses 103 chambres sont dans un état déplorable. Notre interlocuteur, K. A., un investisseur dans le tourisme, nous dit en substance : “la wilaya n'a pas profité de la période noire qu'avait traversée le pays entre 1990 et 2000 pour pouvoir développer ce secteur où des millions d'algériens fuyaient le terrorisme dans les wilayas de Jijel, Béjaïa et Skikda. Ils avaient à cette époque pris la destination d'El-Tarf où il faisait particulièrement bon vivre.” Aussi paradoxal que cela puisse paraître, les autorités locales n'ont rien fait pour mettre une infrastructure d'accueil au flux des estivants venant en particulier des villes de l'intérieur. Les vacanciers se sont alors rabattus sur ce qu'on dénomme le tourisme alternatif. Depuis justement cette période, la wilaya a connu le développement du business de la sous-location. Plusieurs citoyens de la ville d'El-Kala louaient, en juillet juste après l'annonce des résultats des examens du BEM et du bac, leurs habitations aux estivants. Ces derniers viennent généralement des grandes agglomérations ayant pour noms Constantine, Khenchela, Tébessa, Biskra, El-Oued… Ils sont facilement repérables aux immatriculations de leurs véhicules. G. Abdallah, un père de famille, nous apprend que dès la mi-juin, il quitte son logement habituel situé à la cité-dortoir FLN pour le louer à des vacanciers venant de Ghardaïa à raison de 65 000 DA le mois. Il s'agit d'un logement meublé et doté de toutes les commodités. “Les clients me contactent dès le mois de mars et je le cède au plus offrant”, ajoute notre interlocuteur. Cette pratique de la débrouillardise s'est installée à El-Kala depuis les années 1990. Une personnalité connue dans la région loue mensuellement sa villa à une société privée pour organiser des colonies de vacances à plus de 30 millions de centimes le mois. Un autre a cédé, récemment, sa villa du côté des Crêtes ayant vue sur mer pour la bagatelle somme de 25 millions. El-Kala dispose pour cette saison estivale de quatorze plages ouvertes à la baignade d'un port de plaisance, le nouveau étant en réalisation, d'étendues représentées par six lacs classés site protégés par la convention Ramsar, un parc de renommée mondiale zone de passage de repos et de nidification des espèces dites ornithologiques sans compter le patrimoine historique et culturel d'une valeur appréciable représenté par les ruines et sites historiques. Des sites très courtisés par les vacanciers qui y organisent des pique-niques et randonnées pédestres. Les espèces aussi bien végétales et animales sont rarissimes au niveau du parc. B. Omar, un habitué d'El-Kala, passe ses vacances à la plage Messida dans la commune de Oum Teboul. “Je n'ai pas les moyens de louer un appartement, je me rabats sur un camp de vacances, ce n'est pas cher et cela me permet de passer les deux mois de vacances pour échapper au soleil de plomb du bled, Batna.” Pour K. Amokrane avec sa famille composée de trois enfants, ils passent la saison estivale chez ses parents qui habitent non loin du centre-ville. Ses voisins soulignent qu'une saison, il avait lui-même passé l'été sous une tente et dans des conditions inextricables, faute de place. Il est vrai que la ville d'El-Kala est la plus prisée par rapport aux autres communes de la wilaya situées sur le littoral. Ce phénomène de location d'appartements à El-Kala n'est pas une nouveauté. Il a pris des proportions importantes au point où les autorités locales avaient pris des décisions drastiques pour mettre le holà à ce commerce. Des instructions ont été données par l'ex-wali pour mettre un terme à la pratique et protéger les citoyens venant de loin. Mais l'absence d'infrastructures touristiques adéquates, pour pouvoir satisfaire les besoins des vacanciers qui viennent par milliers, a contribué à le perpétrer. El-Kala, cette ville balnéaire ayant la plus belle baie du monde, est la plus gâtée par dame nature. Elle dispose de vastes étendues de forêt au vert qui s'allie au rouge rutilant du soleil couchant pour donner, avec le firmament marin, un concert de tableaux à nu. La cité possède un passé ancestral. Les autorités locales doivent se pencher sérieusement pour la création d'une chaîne hôtelière le long de la côte, longue de 90 km. Il est malheureux de le signaler mais la préparation de la saison estivale s'est faite tardivement. Beaucoup de touristes rencontrés déplorent l'absence d'une culture commerçante et touristique à El-Kala. La vie étant très chère et les prix au niveau des fast-foods, pizzerias, restaurants, magasins… ont connu une hausse vertigineuse. Seuls les cafetiers maintiennent leur prix. Mais une chose est sûre, les habitants, surtout les autochtones, sont accueillants et hospitaliers. T. B.