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Alger exprime son refus
Politique européenne de voisinage
Publié dans El Watan le 04 - 09 - 2007

L'Algérie a officiellement refusé d'adhérer à la Politique européenne de voisinage (PEV). Le rejet a été exprimé par l'ambassadeur d'Algérie à Bruxelles, Halim Benattallah, lors d'une conférence internationale, la première du genre, organisée hier dans la capitale de la Belgique par la Commission européenne.
Bruxelles. De notre envoyé spécial
« Strengthening the European Neighbourhood policy » (Renforcer la politique européenne de voisinage) est l'intitulé de la conférence, tenue au Charlemagne building, à Bruxelles. Y ont pris part des ministres des Affaires étrangères des pays membres de l'Union européenne (UE) et des pays partenaires. L'Algérie n'a délégué aucun officiel et s'est faite représenter par son ambassadeur à Bruxelles. Premier à prendre la parole dans la séance de l'après-midi, Halim Benattallah a créé une mini-surprise en annonçant que l'Algérie préfère « laisser le temps » à l'application de l'accord d'association signé avec l'UE, ratifié et entré en vigueur en 2005, et ne souhaite pas qu'il soit supplanté par d'autres mécanismes de partenariat du type PEV. « Cet accord conserve tout le potentiel de rapprochement et de coopération avec l'UE. Il répond au principe de différenciation et cristallise toutes les priorités nationales liées à l'économie, au droit de l'homme... », a-t-il déclaré. A l'ouverture des travaux de la conférence, José Manuel Barroso, président de la Commission européenne, a insisté pour souligner que le principe de « la différenciation » est fondamental dans la politique de voisinage. « La PEV n'a jamais été une politique de taille unique. Elle peut avoir des variations autant qu'il existe de partenaires. Nous ne pouvons ignorer les difficultés entre nos partenaires », a-t-il déclaré. Autrement dit, les spécificités de chaque pays seront prises en charge dans le partenariat élargi de la PEV. D'après Halim Benattallah, les objectifs de stabilité et de prospérité sont prévus dans l'accord d'association et dans le processus euroméditerranéen de Barcelone (lancé en 1995). « Nous avons la faiblesse d'être toujours attachés au processus de Barcelone avec ses bienfaits et ses faiblesses », a-t-il déclaré. L'Algérie ne peut pas, selon lui, aller vers d'autres initiatives du moment qu'elle est concentrée sur « des problèmes internes » liés aux impacts de l'application de l'accord d'association sur les secteurs de l'industrie, de l'agriculture, des services et autres. « Des dispositions spécifiques sont prévues dans cet accord sur les domaines de l'énergie, de la mobilité, des transports... », a précisé le diplomate. Des domaines jugés prioritaires dans la PEV, tel qu'expliqué par Benita Ferrero-Waldner, commissaire européenne aux relations extérieures et à la PEV, qui a présidé la conférence. Halim Benattalah a estimé que le principe de « l'appropriation », sur lequel s'articule, entre autres, la PEV, doit être clarifié dans la mesure où cela implique une codécision. « Et pour y arriver, il faut qu'il existe une institution commune », a-t-il indiqué. L'ambassadeur d'Algérie (qui a occupé le poste de directeur Europe au ministère des Affaires étrangères par le passé) a noté que la société civile voudrait qu'à l'étape actuelle, l'accord d'association soit mieux appliqué.
Amélioration de la coopération
Cette dernière déclaration a suscité des commentaires dans les coulisses de la conférence. « Un ambassadeur parle au nom d'un gouvernement, pas au nom de la société civile », nous a déclaré une participante. L'Algérie est le seul pays de la rive sud de la Méditerranée à rejeter clairement la Politique européenne de voisinage. La Libye et la Syrie adoptent l'attitude du wait and see. Ils sont ni pour ni contre. Alger semble ne pas apprécier le fait qu'on impose « un plan d'action » avec la PEV qui précise les objectifs à atteindre et les moyens financiers qui y sont engagés. « En Algérie, on n'aime pas la transparence », nous a lancé un activiste d'une association présent à la conférence. L'un des principaux objectifs de la PEV est le renforcement de la démocratie et de la bonne gouvernance dans les pays partenaires ainsi que le soutien du dialogue avec l'Union européenne en matière des droits de l'homme. La PEV vise également l'amélioration de la coopération dans le domaine de la justice, de la liberté et de la sécurité avec et entre les pays partenaires.
Marché intégré de l'énergie
En Europe de l'Est, l'Ukraine, réputée proche des Etats-Unis et qui aspire à adhérer à l'UE, refuse la PEV au motif que ce n'est pas « une bonne base » pour coopérer avec les voisins de l'Ouest. Elle aspire établir une zone de libre-échange. Le Maroc, principal bénéficiaire de la PEV dans la rive sud de la Méditerranée et dans la zone arabe, s'est montré favorable au renforcement de la PEV. L'économiste Fathallah Oualalou, ministre des Finances et de la Privatisation, premier à intervenir après l'ouverture officielle, a déclaré que son pays est satisfait de l'application du « plan d'action » de la PEV. Il a appelé à augmenter les flux financiers liés à ce plan et a plaidé pour l'ouverture plus prononcée du marché intérieur européen. Il a parlé aussi d'une meilleure concertation en matière de cogestion du phénomène migratoire. La migration est souvent perçue, selon le représentant de la Tunisie, comme un problème alors « qu'elle peut être un facteur de développement pour l'Europe ». Benita Ferrero Waldner a annoncé que la Commission européenne a encouragé les Etats membres à accorder plus de facilités en matière de délivrance de visas. Un nouveau système de mobilité (circulation des personnes) va être mis en pratique permettant une meilleure ouverture des frontières. Benita Ferrero Waldner a plaidé pour un marché intégré de l'énergie avantageux pour les producteurs, les consommateurs et les pays de transit. Elle a précisé que des accords énergétiques ont été déjà signés avec l'Azerbaïdjan, le Maroc et l'Ukraine. « Nous espérons qu'un mémorandum d'entente soit signé avec l'Algérie et l'Egypte », a-t-il dit. L'Algérie est le troisième fournisseur en gaz de l'Europe (14%) après la Russie et la Norvège. Non membres de l'UE, ces deux pays ne paraissent pas concernés par la politique européenne de voisinage. Ce fait a été complètement ignoré à la conférence de Bruxelles. Le rapprochement entre Sonatrach et le géant gazier russe Gazprom inquiète les Européens qui craignent la création « d'un cartel ». D'où le souhait de signer le plus rapidement un accord durable avec Alger. A long terme, l'UE aspire, à travers la PEV, mettre en place des interconnexions énergétiques entre l'Asie, l'Afrique du Nord, le Moyen-Orient et l'Europe. Outre l'Algérie, le Maroc et la Tunisie, la PEV est adressée également à l'Arménie, l'Azerbaïdjan, la Biélorussie, l'Egypte, la Moldavie, les Territoire palestiniens, la Syrie, la Jordanie, Israël, la Libye, le Liban, la Géorgie et l'Ukraine. Pour impliquer les sociétés à ce qui paraît comme une vision stratégique, la commission européenne a invité à la conférence de Bruxelles des universitaires, des journalistes, des hommes d'affaires et des représentants d'associations.


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