Le téléphone portable a modifié significativement nos habitudes sociales. Il a même réussi à détrôner le téléphone fixe. Il y a environ six ans, le téléphone mobile était plutôt le signe distinctif du haut cadre masculin, décisionnaire et indispensable à joindre en déplacement. Aujourd'hui et sous l'impulsion de la réforme du secteur des télécommunications en Algérie, il est présent au niveau de toutes les tranches d'âge, sans exception. Auparavant réservé au milieu professionnel, il est maintenant utilisé par le cadre et la ménagère dans la sphère privée. C'est l'instrument branché par excellence. Simple à utiliser, d'usage quotidien, il est, selon les analyses des économistes, « un bien en voie de banalisation ». Ce petit objet suscite une véritable frénésie. Au début des années quatre-vingt-dix, il fallait avoir le bras long pour obtenir une puce. La rareté du produit le rendait d'ailleurs très convoité. Avec trois opérateurs opérationnels sur le marché (Djezzy, Mobilis, Nedjma), la course à l'abonné est lancée. Le marché est en pleine croissance avec un immense potentiel pour les nouvelles technologies et qui, à terme et selon les estimations du fabricant de solutions télécoms suédois Ericsson, représenterait quelque 10 millions d'abonnés en 2008. Le portable donne un avantage : la mobilité et le fait de pouvoir faire des affaires avec une totale liberté de mouvement. Les femmes ont tendance à utiliser leur téléphone pour communiquer, alors que les hommes l'utilisent « comme un jouet interactif ». Cette distinction s'estompe car les hommes parlent de plus en plus avec une utilisation plus fréquente de leur mobile. Les hommes ont l'inclination de montrer plus fièrement leur portable et de les comparer avec ceux des autres. Il existe deux types d'utilisateurs de portables, les discrets et ceux qui parlent plus fort et sont beaucoup moins respectueux de leur environnement. Le SMS (Short Message System) a révolutionné les habitudes des adolescents même si ce service n'est pas encore bien développé en Algérie. Il semble qu'ils soient davantage à l'aise pour exprimer les sentiments par écrit que par oral. En plus, les SMS peuvent être archivés en mémoire et relus. D'après les opérateurs, « 90 % des SMS sont des messages personnels et 10 % d'origine professionnelle ». Le portable fait partie d'un univers culturel fait d'immédiateté, de spontanéité et de sensations rapides. Cependant, il semble y avoir quelques inconvénients. Les exigences des jeunes « On ne peut voir son correspondant, c'est embêtant ! », a affirmé un lycéen. « On ne tombe pas toujours sur son correspondant, alors il faut expliquer », a souligné un étudiant de la Fac centrale. Il y a aussi ceux qui n'aiment pas tomber sur le répondeur, qui donne l'impression de parler tout seul. « Les jeunes sont très sensibles à la mode en général, quelle qu'elle soit (musique, vêtements, jeux). Pour les adolescents, il s'agit avant tout d'un élément nouveau qui fait son entrée dans leur univers ludique. Ils vivent dans une culture de satisfaction immédiate », commente un revendeur d'El Biar. Dans sa boutique, il y a différentes marques de portables mais aussi de plus en plus d'accessoires, de cartes de recharge, des batteries et même les étuis. Le bon vieux modèle 3310 de Nokia côtoie les autres modèles beaucoup plus récents de Samsung et Alcatel. La mode est à la vente des packs. Ils se vendent comme des petits pains. « Les jeunes viennent souvent pour télécharger des sonneries ou débloquer leur téléphone », remarque un autre revendeur d'Alger-Centre. Les jeunes sont généralement plus exigeants en ce qui concerne les nouveautés. Par contre, pour ce qui est des services, ils se contentent du strict minimum. Les cartes prépayées ont permis de démocratiser le portable. Djezzy a été le premier à exploiter à fond le filon en lançant en août 2002 la carte prépayée. Influence de la pub L'engouement a été tel que plus de 70% des clients ont opté pour ce produit qui donne une liberté totale : pas de facture, pas d'abonnement. « Au départ, les clients Djezzy appartenaient aux couches aisées de la population car les prix étaient un peu élevés. Après plusieurs phases de réduction des tarifs, c'est devenu accessible à tout le monde. Aujourd'hui, des jeunes se font des cadeaux entre eux (cartes de Djezzy) », se félicite Hassan Kabani, DG d'Orascom Télécom Algérie. Les jeunes sont aussi influencés par la publicité des opérateurs. Wataniya Algérie Télécom a investi dans l'image en faisant dans le grand spectacle. « Le concept est basé sur la transition entre l'ancien monde et le nouveau monde avec l'utilisation symbolique de figures emblématiques de la culture algérienne, symbole que l'Algérien peut aller loin et devenir international (cirque Amar, Mouloud Feraoun, El Anka). » L'émotionnel y occupe une place stratégique. C'est même le fil conducteur de tous les contenus. Le spot du lion a été tourné sans trucage et celui du conteur a été réalisé avec 100 cavaliers. Le téléphone mobile est très efficace pour renforcer le lien social, notamment avec ses proches. C'est en jouant cette carte que les trois opérateurs ambitionnent de gagner le gros lot.