Le vingt et unième siècle sera féminin ou ne sera pas, il laissera la place à plus de douceur, de tendresse et de sensibilité. Nous sommes convaincus que la longue marche vers le progrès de l'humanité requiert un préalable de taille : la foncière égalité de l'homme et de la femme en droits et dans les faits. Le critère absolu de l'évolution d'une société civilisée est jaugé à l'aune des rapports, en son sein, entre les femmes et les hommes. Ces derniers n'étant, avant tout, que les mâles de l'espèce humaine. Nous soutenons, sans flagornerie aucune pour la gent féminine, que si les affaires du monde étaient davantage confiées aux femmes, nous n'aurions peut-être pas eu autant de drames et de tragédies, maintenant et à travers les siècles. En tout cas, l'état actuel du monde et sa morosité scabreuse sont le produit d'une civilisation humaine quasi exclusivement masculine. Puisqu'en dehors de sa vocation de tendre épouse, la femme fut le plus souvent confinée, depuis sa sortie du gynécée grec, dans le rôle « naturel » d'hétaïre, ménade, bacchante, odalisque ou geisha. Jamais ou presque, elle n'était définie intrinsèquement ni reconnue pour ses qualités personnelles propres. Au mieux, elle réussissait à être l'égérie d'hommes puissants et de génie, ceux qui façonnaient l'Histoire, leur histoire. Aussi, ne plus avoir à parler de « condition féminine », expression contemporaine galvaudée consacrant de facto l'inégalité des sexes – on n'évoque curieusement jamais la condition masculine –, mais poser les problèmes propres au statut infériorisant des femmes dans les contrées islamiques – statut avalisé par le contre-projet politique islamiste – serait-il le signe du dépassement de l'actuelle discordance et l'infamante anomalie morale et sociale qui y prévalent. Nous en sommes, hélas, encore loin, bien que se fasse réentendre à nouveau dans le monde musulman l'air de l'émancipation, souvent réfréné par l'inertie coutumière. Tant et si bien qu'il est vrai que nous percevons poindre à l'horizon de la « nouvelle » pensée musulmane, la volonté inébranlable d'affirmer l'égalité ontologique, foncière et juridique des êtres humains, et de finir avec l'« infini » sevrage des femmes, ce que les doctrinaires islamistes radicaux contestent et s'emploient à étouffer. Ils s'efforcent à réduire au silence toutes ces aspirations légitimes à la promotion de la femme et de l'homme dans une société harmonieuse, respectueuse des droits des êtres, indépendamment de leur genre, soucieuse de se conformer scrupuleusement au nomos universel de l'égale dignité de la personne humaine. Ils présentent une contrefaçon de l'émancipation de la femme avec les mêmes rengaines répétées, mille fois ressassées, sur le Coran qui libère la femme et qui lui donne des droits jamais égalés ! Alors, c'est justement cette universalité du principe d'égalité des sexes qui y résonne comme une promesse sociale et démocratique que des femmes intelligentes et courageuses entendent bien concrétiser. Pour accompagner cette mutation et réaliser cette promesse, la pensée religieuse islamique devra opérer de profondes révisions et entreprendre de sérieuses réformes. Parce que, si la révélation coranique reconnaît la pleine égalité ontologique de l'homme et de la femme, celle-ci n'ouvre pas, de nos jours, dans les lectures exégétiques étriquées et avec les projections mentales limitées, sur une égalité juridique et sociale vécue en tant que telle. L'auteur est Président de la Conférence mondiale des religions pour la paix