Quelques heures après l'attentat de Lakhdaria, le GSPC revendique l'attentat, en diffusant un communiqué de deux pages, signé par « la commission de communication » pour « Al Qaïda au Maghreb islamique ». La photo du kamikaze, du nom de Athmane Abou Djaâfar, arborant une kalachnikov, est la même que celles des autres kamikazes qui l'ont précédé. Cette photo va aider les services de sécurité à faire les premiers rapprochements avec les portraits des jeunes ayant pris le maquis ces derniers mois. Il s'agit, selon nos sources, de Merrouchi Kamel, né en 1976 à Ouled Ali, commune Chabet El Ameur, à Boumerdès. Pour nos interlocuteurs, il faudra attendre la confirmation avec les tests ADN qu'effectuent les services de police scientifique à partir des traces de sang prélevées sur les lieux de l'attentat et du sang des parents du présumé kamikaze. Ce dernier, affirment nos interlocuteurs, a pris le chemin du maquis début 2007, dans le cadre des filières de recrutement pour le « djihad » en Irak. Une stratégie utilisée par le GSPC, depuis son ralliement à Al Qaïda, pour renflouer ses rangs avec de jeunes recrues, très sensibles à ce qui se passe en Irak. Dans le communiqué diffusé quelques heures après l'attentat de Lakhdaria, le GSPC parle d'exécution d'une opération suicide contre « les croisés français » en affirmant qu'en « cette journée du vendredi, à 7h 15, le nommé Athmane Abou Djaâfar, à bord d'un véhicule de type Toyota bourré de plus de 250 kg d'explosifs, s'est dirigé tout droit vers les croisés français qui travaillent dans la construction du plus grand barrage de la région de Hammam, à Lakhdaria (...) et qui bénéficiaient d'une forte escorte de militaires et de gendarmes. L'explosion a détruit totalement la Toyota qui transportait les Français, tuant trois parmi les croisés, et un nombre inconnu des renégats ». Dans le même communiqué, le GSPC annonce « à la France haineuse » qu'il y a entre le groupe terroriste et l'Hexagone « des revanches et des revanches ». Tout en collant leur stratégie au contexte algérien, en affirmant que l'une des « revanches » est liée à la colonisation, le GSPC ne manque pas de lier ses actions contre la France, pour sa « politique criminelle contre les musulmans en Irak, en Afghanistan et au Liban, l'aide apportée à vos suppôts et enfants comme le gouvernement algérien renégat, et les attaques répétées contre les symboles de l'Islam, autant de raisons qui rendent les vrais musulmans impatients de vous attaquer ». Aucune allusion au message de Aimen Zawahiri, le numéro deux d'Al Qaïda, qui avait vingt-quatre heures auparavant appelé Al Qaïda au Maghreb à chasser les Espagnols et les Français de la région. Une déclaration que beaucoup de spécialistes ont assimilé à des consignes de guerre, mais qui n'avaient pas encore atteint leur destination. En fait, le GSPC s'est toujours attaqué aux étrangers, sans distinction de nationalité. En juillet dernier, il s'est attaqué avec virulence aux Français, à travers un communiqué signé par Droukdel, dit Abou Mossab. Celui-ci exprime son « refus total du traité d'amitié » en expliquant que « le vrai Islam refuse le principe d'amitié avec les apostats », et que « tout traité établi avec ses suppôts en dehors des principes de la charia et des vérités de l'histoire ne peut que renforcer son rejet ». Le GSPC avance néanmoins trois conditions pour un tel traité : « Cesser les actes criminels menés, directement ou à travers les généraux qui agissent pour son compte, cesser toute mainmise sur l'Algérie que ce soit dans le domaine culturel, économique ou social, toute aide militaire au régime impie et toute volonté d'hégémonie sur la rive sud de la Méditerranée, de retirer ses troupes de l'Afghanistan et du Liban, et enfin de reconnaître les crimes qu'elle a commis. » Il est clair que le GSPC veut donner l'impression au monde que ses actions ont des prolongements internationaux en les liant à ce qui se passe ailleurs. Or, sur le terrain, les groupes islamistes armés ont de tout temps, depuis le MIA, en passant par le MEI, le GIA, le FIDA, jusqu'au GSPC ou Al Qaïda au Maghreb, utilisent tous les moyens pour faire admettre que leur capacité de guérilla peut mettre en danger les intérêts des Etats. Mais l'échec de l'attentat de Lakhdaria — un kamikaze avec plus de 250 kg d'explosifs pour s'attaquer à quelques véhicules d'escorte — montre que l'organisation de Droukdel semble avoir du mal à atteindre son but.