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Education et religion
Didactique, spiritualité et tolérance en débat
Publié dans El Watan le 02 - 10 - 2007

Le XXIe siècle sera religieux ou ne sera pas », c'est la phrase prémonitoire d'André Malraux qui tend à se confirmer jour après jour, à travers un retour à la religion et à la spiritualité, et ce, de par le monde. Mais certaines manifestations de ce retour au religieux prennent malheureusement des expressions de violence.
Le système éducatif s'est trouvé au centre de l'accusation d'être une fabrique d'extrémistes à travers les programmes subversifs dispensés dans l'éducation religieuse. Sous le thème « Religion et éducation aujourd'hui », la fondation Konrad Adenauer a organisé une soirée thématique, dimanche soir, à l'hôtel Sheraton, invitant hommes de foi, de loi, de sciences et des chercheurs autour d'un débat visant à traiter de cette question de l'enseignement de la religion. Tour à tour, les invités de la Konrad Adenauer Stiftung ont plaidé pour un enseignement non idéologisé basé sur les principes de tolérance.
« Suspicions nouvelles »
Pour Cheikh Bouamrane, président du Haut Conseil islamique, l'enseignement religieux pour les trois religions monothéistes commence au sein du cercle familial puis se trouve complété par l'école. Cet homme de foi estime que pour les trois religions, ce sont les mêmes valeurs qui doivent être enseignées telles que citées par les commandements avec des différences liées aux particularités de chaque religion. « Les lignes directrices convergentes sont plus nombreuses que les lignes divergentes entre les trois religions », dira M. Bouamrane. Un message qui trouvera écho auprès de l'archevêque d'Alger, monseigneur Teissier, qui estime que le dialogue concret entre les religions existe bel et bien sur le terrain à travers différentes actions qui tendent à rapprocher. « Nous cherchons à nous impliquer dans la réponse à des problèmes humains dans la volonté de respecter l'identité des jeunes et la confiance des familles », explique l'archevêque en citant certains engagements éducatifs dispensés au profit de jeunes des quartiers loin du prosélytisme, et visant à se connaître mutuellement dans le respect de l'identité de chacun. « Nous ne sommes pas nombreux dans la société algérienne, mais il y a des suspicions nouvelles à cause de ceux qui font du prosélytisme. Il ne faudrait pas que des problèmes posés par certains groupes qui ne respectent pas l'interlocuteur détruisent cette expérience construite au fil du temps. On peut dépasser notre origine pour faire une communion », dira Mgr Teissier.
Des théories qui s'opposent aux réformes
« Un enfant qui est autonome ne se fait pas exploser. » Venant du Maroc et représentant la fondation du roi Abdul Aziz Al Saoud, Mohamed Seghir Janjar dresse un tableau peu reluisant sur l'enseignement de la religion dans son pays. Un constat similaire dans de nombreux points avec l'expérience algérienne. « Jusqu'aux années 1970, c'est l'enseignement traditionnel qui était répandu à travers notamment les zaouïas. A partir des années 1970, l'enseignement de la religion a été généralisé à toutes les écoles. Mais le contenu donné à cet enseignement était basé sur la présentation d'un Islam défensif vis-à-vis des autres idéologies venant de l'extérieur, mais aussi des contestations internes », notera le conférencier, en soulignant que dans cet enseignement « on a oublié l'aspect didactique pour un enseignement idéologique créant une certaine schizophrénie chez l'élève ». Des générations entières ont été formées sur ce modèle manichéiste, explique Janjar en précisant que la bombe explosée à Casablanca en 2003 a fait réagir les autorités en décidant de supprimer des programmes tout ce qui a trait à la subversion. « Ils ont toutefois oublié de supprimer l'enseignant qui dispensait ce type de cours » ajoutera-t-il. Le même conférencier remarque un décalage entre le monde actuel et l'enseignement de la religion. Doit-on garder ces masses de hadith et de textes coraniques, ou opter pour une socialisation de l'enfant, se demande M. Janjar, en notant qu'au Maroc « on enseigne la théorie de la famille en Islam qui est opposée à la réforme établie par la nouvelle moudawana ». Le représentant du ministère des Affaires religieuses, Dr Rasmel, considère qu'à travers toutes les réformes, le système éducatif n'a pas pu répondre aux attentes de la société en termes de création de lien entre l'élève et sa civilisation. Le Pr Nacéra Zellal, qui traite à l'université d'Alger de l'épidémiologie scolaire, estime pour sa part que « l'enfant est soumis à un matraquage à travers un enseignement qui n'obéit à aucune construction de la stratégie d'apprentissage ». Mme Zellal déplore que l'école algérienne n'enseigne pas l'autonomie et n'apprend à l'enfant d'avoir le choix. « L'enfant autonome peut prendre le choix de ne pas se faire exploser en devenant kamikaze ou harraga », explique la professeur. Le père Gonzales rejoint cette idée en notant que « l'enfant n'est pas un objet, mais il faut tout faire pour qu'il devienne un sujet, pour qu'il soit capable de choix devant Dieu », dira-t-il en regrettant que les pédagogies soient toujours squattées par le pouvoir. Pour le philosophe et islamologue, Ziki Ali, la clé de l'enseignement de la religion réside dans l'équilibre de trouver dans la hiérarchisation des valeurs et mettre la religion au niveau des autres valeurs. « Un théologien doit être outillé de sciences et comprendre le monde pour expliquer la parole de Dieu », dira M. Ziki. Alors que son collègue Khenchelaoui Zaïm trouve que le soufisme est capable de réaliser une communion intracommunautaire s'il investit le champ de l'éducation.


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