Notre collègue Abdelwahab Boumaza vient de publier un livre intitulé Had Ezzine et autres contes paru aux éditions Alpha. Combien d'entre nous peuvent-ils encore retrouver l'enfant qu'ils ont été pour accéder à volonté au monde des merveilles ? Dans Had Ezzine et autres contes, paru au mois d'octobre aux Editions Alpha, Abdelwahab Boumaza, chef du bureau régional de l'Est d'El Watan, aborde le conte, à sa manière, simple et grandiose, à la mesure de ceux qui en sont à l'origine, c'est-à-dire nos grands-mères qui, telles des vestales antiques, se font gardiennes des belles traditions, et peut-être même les grands-pères, avec un peu moins de conviction, cependant. L'auteur s'est fait le chantre des petites gens, humbles et effacées, dont la noblesse réside dans le cœur. Il a aussi sondé, sans prétention, quelques âmes occultes, ou glauques, c'est selon, tel ce père-roi, jaloux, ombrageux, qui porte à sa fille un amour équivoque, exclusif, allant, dans sa fureur possessive jusqu'à poser des conditions, toutes plus absurdes les unes que les autres (mais bien à dessein), à ceux qui convoitent la main de celle-ci. La princesse est bien trop belle pour appartenir à un autre que lui. Il se fera donc un réel plaisir de passer « au fil tranchant » ces impudents qui osent rêver de la posséder. Un seul le défiera : un prince accompli, résolu dans sa quête et purifié par une action désintéressée — il sauvera un vieillard des mains cruelles de deux hommes — et en fera un compagnon de route. Ce dernier sera aussi son ange-gardien et le fera bénéficier de sa sagesse et de son expérience. Intervient alors le merveilleux, à l'aune des épreuves chimériques, donc réalisables seulement par des moyens occultes, magiques. Et tout devient simple pour ceux qui ont su garder une âme pure. S'ouvre à eux un univers prodigieux où tout parle, des animaux aux fourmis (ces dernières n'ont-elles pas parlé au prophète Salomon, dans les Ecritures Saintes ?). Tout se fait par l'entremise d'êtres fabuleux, jusqu'au ravisseur de mariées, monstre mythique qui pourrait bien être un avatar de ce père fou de la beauté de sa fille. Ou encore l'histoire drôle de ce mystificateur malgré lui, qui ne doit ce rôle qu'aux conseils de sa femme, belle et surtout intelligente. Et enfin, ce petit bijou qu'est l'histoire de l'enfant-martyr. Ses bourreaux ne sont autres que ses propres parents. L'auteur dira pudiquement les choses par la bouche d'une femme, la vieille mais combien belle Larem. « Lever la main sur un enfant est un acte sacrilège », dira-t-elle. Elle nous fera part aussi de cette terrible sentence : « On voudrait qu'il (l'enfant) soit… sage comme nous ! Ah, que dirais-je de notre sagesse ! C'est un conte de cruautés raffinées, enrobées de silence précaire et forcé. » L'auteur, qui se fait troubadour, chante l'enfance convoquée pour sauver l'adulte désorienté, qui est en nous. ------------------------------------------------------------------------ Had Ezzine et autres contes Abdelwahab Boumaza Editions Alpha