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De fausses identités religieuses imposées sur les cartes d'identité
Situation des droits individuels en Egypte
Publié dans El Watan le 15 - 11 - 2007

En Egypte, les cartes d'identité portent la mention de la religion, mais ce n'est pas contre cela que s'élèvent les organisations Human Rights Watch et l'Initiative égyptienne pour les droits individuels (EIPR) dans un rapport sur les restrictions aux libertés religieuses rendu public le 12 novembre.
Le Caire (Egypte). De notre correspondante
Ce qui est détaillé dans ce rapport de près de 100 pages présenté lors d'une conférence de presse qui, curieusement, a rameuté bien plus de correspondants étrangers que de journalistes égyptiens, est un phénomène de plus en plus courant en Egypte où des citoyens se voient contraints par les agents du ministère de l'Intérieur, chargés de la confection des cartes d'identité, de choisir entre mentir sur leur confession religieuse ou renoncer à avoir une carte d'identité.
Intimidations
C'est le cas notamment de la communauté religieuse des « baha'is », « dont les membres subissent, affirme le représentant de HRW, Joe Stork, des tentatives de corruption et des intimidations pour renoncer à demander la mention 'baha'i' sur leur carte d'identité et accepter qu'elle soit remplacée par la mention 'musulman' ». Les baha'is, qui sont à l'origine issus d'une secte dérivée du chiisme et née en Iran, sont une communauté confessionnelle qui compte près de 7 millions de personnes dans le monde, dont une majorité en Iran où ils sont d'ailleurs régulièrement persécutés. En Egypte, bien moins nombreux (entre 2000 et 10 000 personnes selon les sources), mais tout de même présents depuis plus d'un siècle, les baha'is vont régulièrement aux tribunaux pour faire valoir leur droit de ne pas se voir imposer une identité religieuse qui n'est pas la leur. D'ailleurs, ils rappellent, photocopies de leurs cartes d'identité périmées à l'appui, qu'il fut un temps pas si lointain où y compris leurs extraits de naissance portaient sous la case religion soit la mention « baha'i » soit la mention « autre ». Utiliser la mention « autre » est d'ailleurs une revendication des baha'is qui affirment que pour eux l'essentiel est de ne pas se voir affiliés à une confession qui n'est pas la leur. Autre problème soulevé par ce rapport, celui des convertis qui ne souhaitent plus être musulmans et à qui le ministère de l'Intérieur dénie le droit de changer la mention « musulman » sur leurs cartes d'identité, « alors que, affirme Hossam Bahgat, directeur de l'EIPR, rien dans la loi égyptienne ne l'interdit, nous avons épluché la Constitution qui garantit la liberté de culte, le code pénal qui ne prohibe pas le changement de religion quelle qu'elle soit, et enfin le code civil qui stipule que les changements sur les documents civils sont permis sans aucune restriction ».
Convertis à leur insu
D'où vient alors cette politique imposée depuis quelques années ? « Cela se fait à l'initiative personnelle d'individus employés au ministère de l'Intérieur et qui ont décidé de faire appliquer une interprétation, la leur, de la charia musulmane, à savoir que seules les ‘trois religions révélées' pouvaient être mentionnées sur les cartes d'identité », a expliqué encore l'avocat égyptien. Ceux qui n'acceptent pas que leur soit imposée sur leur carte d'identité une religion qui n'est pas la leur se retrouvent sans carte d'identité, ce qui ouvre droit, en Egypte, à un palmarès de galères, étant donné qu'il s'agit d'un document exigé partout, pour la plus anodine comme pour la plus sérieuse des transactions. Enfin, révèle encore ce rapport, des Egyptiens ont été convertis à leur insu sur les registres d'état civil du christianisme à l'Islam. Ainsi, un Egyptien peut naître chrétien, grandir dans une famille chrétienne, aller à l'église, recevoir à l'école le cours obligatoire d'éducation religieuse pour élèves chrétiens, et découvrir à l'âge de 16 ans – âge à partir duquel les Egyptiens peuvent demander une carte d'identité – qu'il est enregistré dans les fichiers d'état civil comme musulman, portant un nom musulman ! Cela peut paraître loufoque, mais ça ne fait pas du tout rire les témoins présents à la conférence de presse et qui sont de jeunes coptes dont les pères ont quitté le domicile familial et leurs mères chrétiennes pour se convertir à l'Islam, épouser une musulmane et fonder un nouveau foyer. Même lorsque ce ne sont pas les pères convertis qui en ont fait la demande, les enfants restés avec la mère chrétienne sont, à leur insu, convertis à l'Islam d'office et enregistrés sous des noms musulmans par des agents de l'état civil qui ont décidé, en leur âme et conscience, de « choisir pour l'enfant la meilleure des deux religions de ses parents ».


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