Après Tintin au Congo, Sarko au Sénégal. Plus d'un demi-siècle plus tard, le discours ne change pas. L'Africain, cet être immature, ne doit s'en prendre qu'à lui-même s'il est dans cette situation catastrophique. La traite négrière, le colonialisme, le soutien aux tyrans, aux régimes corrompus, la spoliation des matières premières ? Non, rien de tout ça. Surtout pas de repentance. Le rapporteur spécial de l'ONU sur le racisme, la discrimination raciale et la xénophobie, le Sénégalais Doudou Diène, s'en est pris au président français, Nicolas Sarkozy, qu'il a accusé de s'être inscrit dans « une dynamique de légitimation du racisme ». Il a critiqué sévèrement son discours prononcé à Dakar le 2 juillet dernier. Dans cette allocution, le président français avait estimé que « le drame de l'Afrique, c'est que l'homme africain n'est pas assez entré dans l'Histoire » et que « jamais il ne s'élance vers l'avenir ». De grands enfants, ces Africains. C'est la continuité, dans toute sa laideur. Jamais la France n'a semblé si fermée, si haineuse envers ses étrangers. Tests ADN, obligation de délation pour les Assedic de signaler les étrangers qui viendraient à s'y inscrire, contrôles au faciès, reconduites à la frontière, suspicion, la droite, comme toujours, prend l'étranger comme bouc émissaire pour cacher ses difficultés. Les chômeurs étrangers ne seront plus indemnisés désormais dans les mêmes délais que les Français. Le temps que la préfecture vérifie leurs documents administratifs. La suspicion, encore et toujours. Parce que, pour cette droite décomplexée, l'étranger est au préalable un fraudeur. Cinq lois sur l'immigration en cinq ans. Toujours plus répressives. La France a déjà les conditions de regroupement familial les plus restrictives d'Europe, alors même qu'elle durcit à nouveau sa législation. A force de courir derrière son extrême, la droite française a fini par perdre son âme depuis longtemps. Après « les moutons dans la baignoire », Nicolas Sarkozy continue de draguer les électeurs du Front national, à qui il doit sa victoire. Lui qui intervient avec célérité au moindre fait divers observe un silence assourdissant sur l'ADN. Laissant ses lieutenants abattre le sale boulot. Si Fadela Amara s'est distinguée en qualifiant de « dégueulasse » le projet de loi avant de rentrer dans les rangs, Rachida Dati et Rama Yade applaudissent sans complexe ce durcissement, oublieuses sans doute d'où elles viennent. L'étranger, ce cache-misère. Car pendant qu'une partie de la population s'indigne ou, au contraire, demande des mesures encore plus draconiennes contre les immigrés, le gouvernement continue sa casse sociale, masque la croissance grippée. Les étrangers sont attirés par la France car ce n'était pas un pays comme les autres. Paradoxalement, son gouvernement se décarcasse pour en gommer toutes ses spécificités. Finie la patrie des droits de l'Homme, place à un pays gouverné comme une PME déficitaire. C'est aussi ça la France, un pays rendu désespérément banal par sa droite bling-bling.