Rien de ce qui faisait sa réputation d'antan n'est visible actuellement. La route principale de la petite ville « étouffe ». Les propriétaires de véhicules ne peuvent garer en raison de la procession étonnante des voitures tout au long des trottoirs du centre-ville. Des policiers, dont le commissariat se trouve sur la grande route (l'est-elle vraiment ?), verbalisent à tout-va. La vingtaine de kilomètres qui sépareBirtouta d'Alger, à laquelle celle-ci fut rattachée après la création du Gouvernorat du Grand-Alger, n'en fait pas une destination prisée des Algérois. « Il y a comme une concurrence entre ces concessionnaires dont le nombre ne cesse de prendre de l'ampleur », relève Mohand, dont l'écurie se trouve sur l'autre côté de la route. Celui-ci s'est trouvé un filon, le commerce du bétail. « Depuis quelques années déjà, je ne vois les gens de mon quartier qu'à l'approche de l'Aïd. J'ai un pied-à-terre ici et je m'y plais », soutient-il en affirmant que Birtouta n'attire plus grand monde à part des commerçants des wilayas voisines. « Qui s'y intéresse, excepté quelques spéculateurs qui ont transformé des haouchs entiers en ranchs ‘'sans grande envergure'' », a-t-il ajouté. Les premiers à s'y installer n'y verront que du feu. Les quelques maisons coloniales qu'ils ont dû abandonner furent occupées et s'affaissent par pan entier. Quelques habitants seulement s'y sont accrochés lors de la dernière décennie — plus de 300 00 sont venus des wilayas voisines. Cette « halte » des anciens voyageurs est devenue le lieu privilégié de certains débrouillards qui y ont fait leur « ville de retrait ». L'avenue Chahid Ali Bouhadja « ramasse » toute la vie de ces habitants décentrés qui ne partagent pas grand-chose mais ont un seul souci : « Gagner plus ». Bir El Mouta, comme aime à la désigner les plus jeunes — les plus désabusés aussi – n'a pas été cet eden tant souhaité par tous. Les sinistrés de Bab El Oued en 2001 n'arrivent pas à s'habituer à leur nouveau mode de vie. Point de tracas ni même ces odeurs dont raffolent les habitants de ce vieux quartier de la capitale, « au charme particulier ». De harassants allers-retours sont imposés aux plus malchanceux d'entre eux. Pour rejoindre nos lieu de travail, tous situés au centre-ville, « on doit se taper plusieurs kilomètres », atteste Hamid qui travaille dans une manufacture à Belouizdad. Même à quelques lieux seulement de leurs anciennes « vies », les habitants « déplacés » restent sur leurs vieux souvenirs. « C'est qu'ici, tout est délabrement et laisser-aller », raconte Ali, la trentaine à peine entamée, mais sur qui la misère colle aux guêtres. « Que l'on ne me raconte pas des salades. Ces candidats ne pensent qu'à leur khobza. La vie des résidants, il n'en ont cure », lance-t-il. Reste que des gens, lâche-t-il, débrouillards, ont su se recycler dans cette ville de la périphérie d'Alger. Les domaines autogérés de la Mitidja disparaissent à vue d'œil sans que les autorités, « elles-mêmes complices », ne daignent à y mettre le holà. « Ce que font les autorités de la wilaya est du tape-à-l'œil. Personne ne se soucie de ces terrains puisque tout le monde est gagnant », relève le jeune désabusé. Autre bizarrerie dans cette ville : avec une population répartie sur une surface de 25 km2, la commune de Birtouta reste confrontée au problème du découpage administratif, toujours récurrent. Le tiers du boulevard principal de cette municipalité relève, atteste-on, de la commune de Khraïcia. Les Birtoutis affirment rencontrer les plus grandes difficultés à connaître à quelle municipalité ils appartiennent.