Pour parer au plus pressé, après le séisme du 21 mai 2003, des milliers de familles, qui se sont retrouvées du jour au lendemain sans toit ou dans des maisons menaçant ruine, ont été relogées dans des chalets à la périphérie d'Alger-Est. Ces habitations, initialement prévues pour les victimes du séisme, ont été occupées par diverses couches sociales de la société. La plupart des sinistrés du séisme ont été relogés dans des logements en dur, mais pas tous — pourtant les structures officielles affirment que tous ont bénéficié d'un appartement. Constatation sur place, des locataires avec « sinistré du 21 mai 2003 » dûment apposé sur leur décision d'attribution habitent encore ces maisons de fortune. « Ceux qui ont bénéficié de nos logements sont des familles venues de Diar El Kef et de La Casbah dont leurs demeures menaçaient ruine. Nous avons été oubliés, nous les sinistrés du séisme, au détriment des autres », dira un vieil homme rencontré sur les lieux brandissant sa décision. Aussi avec la campagne de débondivillisation entamée par différentes APC de la wilaya d'Alger, plusieurs familles y ont été « relogées », éradiquant un tant soit peu les transits tel celui de Tamaris (Mohammadia). Nonobstant, même des habitants des communes limitrophes ont été délocalisés — entre autres une cinquantaine de familles de Kouba qui y résidaient depuis la période post-indépendance — pour rejoindre les chalets « momentanément, soit 18 mois », selon les officiels de l'époque, une expropriation pour cause d'utilité publique. Ils y séjournent toujours. A Aïn El Kahla (Heuraoua), Amirouche et Bouraghda (Réghaïa), Les Castors et Les Ondines (Bordj El Bahri), Bateau cassé (Bordj El Kiffan), Dergana, Aïn Taya et Rouiba, des centaines de chalets sont érigés, collés les uns aux autres ; des réduits de 36 m2 pour accueillir des familles dont le nombre de personnes dépasse parfois la dizaine. La vie est des plus misérables. Cette concentration humaine fait craindre le pire, une crise implosive se fait ressentir lorsqu'on accède à ce labyrinthe de Thésée. Objet de toutes les convoitises Selon des indiscrétions, des chalets sont loués à des tierces personnes moyennant quelque 15 000 DA/mois. Un citoyen, voulant se rapprocher de son négoce, a fait l'objet d'une escroquerie dernièrement. Etablissant une reconnaissance de dettes de 20 millions de centimes dûment établie par un notaire, le malheureux n'a pu ni occuper le chalet et encore moins, récupérer son argent. Alors que de nombreuses familles végètent dans des bidonvilles accroissant leur prolifération, près de 500 chalets sont inoccupés. Ils sont laissés à l'abandon, et lorsque l'on sait que la valeur d'un tel habitat avoisine les 100 millions de centimes, l'on comptabilise aisément la perte financière engendrée par l'Etat qui n'a pas l'air de s'en préoccuper outre mesure. La plupart sont dans un état de vétusté avancé. Ils font l'objet de convoitises de la part des citoyens à la recherche d'un toit — un couple « Just married » s'était même déplacé sur les lieux pour « s'approprier » un chalet à la fin de la cérémonie familiale — et des voleurs qui rôdent la nuit pour prendre tout ce qui peut leur tomber sous la main : ampoules électriques, évier, siège de toilette... même les tuyaux de canalisation en cuivre ne sont pas épargnés. Ils sont arrachés pour être écoulés sur le marché parallèle. Face aux aléas de la vie, du temps et au manque d'entretien, ces chalets se dégradent au vu et au su des autorités compétentes sans qu'ils ne soient utilisés à des fins utiles au profit des nécessiteux. En l'absence d'un dispositif clair dans ce domaine définissant une réglementation idoine pour ce genre d'habitations, il semble qu'une commission cogite à l'entrée en vigueur de l'application des tarifs de location des chalets afin de les rentabiliser, ce qui risque de faire des remous au sein de la population « sinistrée ».