La musique dissonante, par moments, n'a pas empêché Nadia Benyoucef d'interpréter un répertoire qui l'a fait connaître. A l'auditorium du complexe Flici, on remarquera la prédominance de la gent féminine. La communion de la chanteuse avec son public, qui connaissait le répertoire, était complète. Il n'est pas rare d'ailleurs, d'entendre ce public, que l'on a fait attendre plus d'une heure, suivre les chants interprétés par celle qui représente une certaine image de la musique traditionnelle. Nadia Benyoucef, après une absence puis un retour discret sur la scène artistique, semble avoir mis les bouchées doubles à la faveur des concerts organisés au pas de charge dans le cadre de la manifestation qui tire à sa fin d'Alger, capitale de la culture arabe. Plusieurs concerts sont organisés à travers l'Algérois où l'enfant de La Haute Casbah — elle est née à Bab Djedid et est originaire de Cherchell — confirme ses talents d'artiste attitrée au timbre particulier. L'interprète, connue pour ses duos avec Chaou (El waldine et Kahwa ou latey) et avec Nouri Koufi (Yassadni et Lazem Tedbir), a repris des chansons de chanteurs chaâbi . Celle à qui Maâti Bachir a composé des chansons comme Aâmrat Dari, Lqit elghzel, El Mouhami, ne se départira pas pour autant de son répertoire qui a fait son succès et la réputation dont elle jouit parmi un large public. D'El Badji, chanteur de musique chaâbi et grand compositeur devant l'Eternel, elle reprendra la chanson El meknine ezzine. Cette chanson chaâbi, reprise par plusieurs interprètes, prend une autre dimension touchante quand elle est chantée par une voix féminine, notamment par Nadia Benyoucef. La tristesse la submerge sans pour autant que l'espoir chevillé au corps disparaisse. Le disparu a enfin trouvé la voix féminine à son œuvre. Après un passage remarqué à Alhan oua chabab, la chanteuse, âgée à l'époque d'à peine 15 ans, a su se frayer un chemin parmi les chanteurs hiératiques de chaâbi, avant de s'éclipser de la scène et de revenir de plus belle dans le circuit. Pour certains observateurs avisés de la scène artistique algéroise, il ne sera pas facile, malheureusement, de trouver d'autres interprètes de ce genre musical dont il ne reste que quelques icônes comme Fadhila Dziria et quelques chansons conservées à la Radio nationale. Nadia Benyoucef semble être en osmose avec cette musique et en privilégiant ses passages sur scène avec un orchestre féminin, au jeu musical particulier. Le marketing y est aussi présent. Le pari semble réussi, quoique la machine ne soit pas encore bien huilée.