L'espace de 48 heures, cinq ressortissants allemands ont, par maladresse ou par calcul, jeté l'émoi au sein de la communauté nationale en s'éclipsant mystérieusement au cours d'une randonnée dans le Grand Sud. Leur traversée du désert n'aura donc duré qu'un court laps de temps puisqu'ils ont été repérés et interceptés par la Gendarmerie nationale après de coûteuses opérations de recherche effectuées sur un territoire grand comme le quart de l'Allemagne réunifiée. Ces touristes d'un nouveau genre ne s'étaient, semble-t-il, pas volontairement fourvoyés en ces lieux désertiques du Sud djanetien pour quelque extravagance exotique entre ciel et dunes. Ils avaient plutôt, indique-t-on, l'appétit mercantile de pilleurs de tombes des temps modernes. Statuettes ou gravures rupestres, les représentations archéologiques de diverses natures de ce musée ouvert que sont les vestiges historiques du parc du Tassili continuent d'exciter la convoitise des collectionneurs du monde entier. Cette tendance à la flibusterie internationale quasi criminelle qui tend ses ramifications organisées particulièrement en Europe n'est pas nouvelle en soi. Et à chaque fois que de telles forfaitures se font jour, se repose inévitablement la question du gardiennage, donc de la préservation de ces sites archéologiques parmi les plus prestigieux de la planète. Parce que maintes fois chez nous la bêtise humaine a tué impunément la mémoire. Alors que d'autres pays, comme l'Italie, l'Egypte ou la Grèce, tirent des ressources considérables de leur patrimoine historique, des pillards venus d'ailleurs deviennent aujourd'hui légion dans nos principaux sites archéologiques, aidés, parfois, par des autochtones sans vergogne appâtés par le gain facile. L'autre effet engendré par la fausse disparition des cinq ressortissants allemands a réveillé les craintes des Algériens de revivre le même scénario que celui perpétré par Abderrezak Le Para et son groupe, le GSPC, il y a de cela une année, sur d'authentiques touristes de même nationalité. Les citoyens nationaux, traumatisés par ces péripéties dramatiques - qui ont connu un dénouement heureux pour les otages -, ont craint, l'espace de quelques jours, que la région ne retombe dans les mêmes incertitudes. En cette période de fin d'année, une saison à la pointe de l'activité touristique, une telle situation aurait eu des conséquences dramatiques sur la densité des visiteurs de notre Grand Sud. Des dommages considérables lorsque l'on sait que l'Atlas saharien renoue après plus d'une décennie d'abstinence avec les flots incessants d'amoureux des grandes étendues désertiques.