Fatiha, 50 ans, enseignante, Ben Aknoun, Alger. « Le ministre de l'Education s'occupe des programmes, mais oublie que les enseignants ne vivent pas convenablement. On vit misérablement avec la sensation qu'on se moque de nous. Il faut réagir. » Ammar, 43 ans, chef d'entreprise, Beni Messous, Alger. « Je pense que la revendication des salaires est légitime. Le niveau et le système de rémunération appliqués depuis le statut général du travailleur sont des raisons majeures de la situation de quasi-déliquescence dans laquelle se trouvent les institutions (corruption, démotivation, baisse de la productivité...). » Dakhli El Mekki, 49 ans, maître de conférences à l'université Badji Mokhtar, Annaba. « Le statut particulier est en deçà de nos espérances. Nous adhérons à ce mouvement de grève pour revendiquer la place qui revient à l'élite dans notre société. La marginalisation des compétences relève d'une ère révolue. » Omar, 46 ans, enseignant à l'université de Bab Ezzouar, Alger. « Le ministre a fait des efforts, mais ils sont clairement insuffisants. Il ne faudrait pas oublier que ce sont les salariés qui font tourner l'économie algérienne. On mérite mieux. » Nacer Bourtel, travailleur à l'hôpital psychiatrique de Djebel Ouahch de Constantine. « Tous les travailleurs de l'hôpital sont prêts à répondre à l'appel des syndicats. Nous refusons catégoriquement que d'autres syndicats, qui ne nous représentent même pas, parlent à notre place, alors que c'est à nous de nous prendre en charge. Notre action d'aujourd'hui ouvre, bien au contraire, une nouvelle porte de dialogue avec la tutelle, qui doit se pencher sérieusement sur les deux problèmes majeurs, le statut professionnel et la grille de salaires. » El Hadj, 41 ans, enseignant à l'université de Chlef. « Je crois, sournoisement ou inconsciemment, aux conséquences de l'injustice des salaires sur la qualité du service et du rendement. On essaie délibérément de créer des divisions en instaurant des écarts remarquables entre les différentes catégories socioprofessionnelles tout en favorisant les responsables. Notre université étouffe et sera bientôt à l'agonie. » Ghania, 42 ans, secrétaire dans une entreprise privée, Bab Ezzouar, Alger. « A chaque fois que les salaires augmentent, le coût de la vie suit le mouvement. Ce n'est pas normal. Même si, dans le privé, je suis un peu mieux payée que dans le public, je suis solidaire avec les fonctionnaires. Ils n'arriveront peut-être pas à faire plier le gouvernement pour l'instant mais c'est important de protester et de dire qu'on n'est pas d'accord. » Mounir, 32 ans, étudiant en histoire, Oran. « Je suis pour : jamais durant les vingt dernières années la classe moyenne n'a été aussi dévitalisée. On assiste à un renversement de l'échelle des valeurs : un enseignant est beaucoup moins considéré et respecté dans la société - dans sa propre famille - qu'un trabendiste ou un gars qui se fait de l'argent vite et facilement... » Mohamed, 39 ans, enseignant, Oran. « Après avoir étudié les explications données, la nouvelles grille des salaires proposée n'apporte finalement pas grand-chose, du moins pas autant qu'on l'aurait souhaité. Mais pour ce qui est de participer au mouvement, je reste indécis. » Mourad, médecin résident dernière année, hôpital Mustapha, Alger. « Le problème, c'est que les résidents n'ont pas de représentant syndical. La force qu'ils représenteraient au sein de l'hôpital serait telle que l'administration a cassé toutes les tentatives. Nous sommes tous concernés par cette grève. Dans un an et demi, je serai praticien et je me pose des questions sur le salaire que je toucherai après douze ans d'études ! » Mohamed Bentebal, maître assistant au service de pédiatrie du CHU Constantine. « Nous étions vraiment déçus par les promesses non tenues de la tutelle, concernant le statut professionnel et la grille des salaires. Devant le mutisme des responsables, qui dure quand même depuis une année, on est déterminé à faire encore entendre notre voix et aller jusqu'au bout dans notre action. » Propos recueillis par : Mélanie Matarese, avec les bureaux d'Oran, Annaba et Constantine