Jeudi dernier, l'espace Noun accueillait Hamid Skif pour une rencontre autour de son dernier roman La Géographie du danger, prix du roman francophone 2007. Je suis très indiscipliné ». C'est ainsi que Hamid Skif se décrit ; l'écrivain natif d'Oran n'a vraisemblablement pas fini de nous surprendre ! Introduit par Youcef Sayeh, journaliste à la radio nationale Chaîne III, l'auteur est revenu sur l'écriture de La Géographie du danger paru aux éditions Apic en Algérie. Guetté par cette schizophrénie du journaliste-écrivain que beaucoup d'auteurs connaissent, Hamid Skif a insisté sur la difficulté de décrire cette chose à la fois simple et compliquée qu'est l'intensité du drame. Comment faire pour trouver les mots justes, ceux qui décriront les sentiments de cet homme clandestin. Souvent interrogé, l'auteur dit ne pas avoir connu cette situation ; selon lui, un écrivain n'a pas besoin de connaître un fléau humain pour pouvoir le narrer. Cependant, des rencontres à Hambourg (l'auteur y vit depuis 1997) avec de jeunes sans-papiers l'ont profondément marqué. Avec ce roman, l'écrivain dit avoir découvert « un nouveau rapport avec le lectorat ». Le public a été très touché par ce livre qui aborde la peur, l'exil et paradoxalement l'amour. En effet, cet être enfermé dans sa chambre va avoir un discours de tendresse pour le genre humain. Ce personnage sans nom va construire son identité au fil des pages et bousculer les idées reçues. Loin de l'image d'analphabète que beaucoup ont des sans-papiers, le héros est un ingénieur électronicien qui aurait pu réussir dans son pays d'origine mais qui a choisi de confier sa vie à un passeur. Après la lecture de quelques extraits du livre par l'auteur en personne, les débats se sont principalement focalisés sur le thème des harraga qui intrigue de nombreux intellectuels. S'il est vrai que la fermeture des frontières européennes a rendu le sujet médiatique, c'est la détermination de ses hommes et femmes qui interpelle. Comment ces familles en sont-elles arrivées à adopter ces comportements presque suicidaires ? La recherche du bonheur, peut-être, des problèmes sociaux profonds, sûrement. Hamid Skif a pris l'exemple de l'Algérie, un pays qui a la capacité de proposer autre chose que la désespérance à ses jeunes, mais qui pourtant ne fait rien pour les retenir. L'auteur n'a pas voulu faire un livre documentaire mais plutôt un roman qui pousse les lecteurs à œuvrer pour un monde plus juste. A eux aussi d'imaginer l'épilogue de ce huis clos ; Hamid Skif a volontairement laissé une fin ouverte qui permet à chacun de choisir le destin du narrateur. Aucune suite n'est prévue, l'écrivain algérien est déjà sur d'autres projets. A noter que Les Escaliers du ciel paraîtront prochainement en Algérie. La Géographie du danger de Hamid Skif. Editions Apic