Le navire squatte depuis plus de sept ans un quai du port de Béjaïa après avoir été pris dans les rets d'une opération de saisie intentée par les créanciers de l'armateur. Après l'insuccès d'une première tentative de mise en vente aux enchères conduite par la direction des Domaines de la wilaya, le bateau devrait être, une seconde fois, proposé à la vente dans les semaines à venir. C'est en 2000 que le cargo, battant pavillon Saint-Vincentais, une île détaxée des Caraïbes, a accosté à Béjaïa avec une cargaison de sucre. Le piège légal tendu notamment par les compagnies d'assurance et des consignataires, s'il a pu immobiliser le patrimoine – que l'armateur ne réclamera point d'ailleurs – a également fait subir une véritable épreuve physique et psychologique aux membres de l'équipage. Les onze marins, issus de sept nationalités différentes, sont restés prisonniers du bateau durant près de six mois, leurs employeurs ne répondant pas à leurs nombreux SOS et ne versant pas leurs salaires. Les matelots, échoués à des milliers de kilomètres de chez eux, n'ont pu survivre parfois que grâce à la solidarité des opérateurs du port. L'histoire de cette « captivité » a tellement ému qu'elle a fait l'objet d'un documentaire français (Les hommes du Labici-B, de François Chilowicz, 2003) qui a fait le tour des festivals en 2003 avec en filigrane une réflexion sur cette vie de marins naufragés dans les no man's land de la juridiction internationale en matière de navigation. Si les malheureux matelots ont pu, plus tard rentrer chez eux, grâce notamment à l'intervention de leurs représentations diplomatiques respectives, le navire, épave de luxe, tangue depuis plusieurs années au port, obligeant l'entreprise portuaire de Béjaïa (EPB) à une veille permanente, notamment en hiver, pour éviter des accidents. Sur le préjudice économique en matière de manques à gagner, et qui pourraient « dépasser la valeur du navire », le PDG de l'EPB préfère ne pas trop se fixer, appelant seulement de ses vœux la libération la plus immédiate possible du quai occupé par ce cargo de 82 mètres de long.