Incertitude au Tchad ! 17 ans après son arrivée au pouvoir par la force (1990), le président tchadien Idris Deby Itno risque d'être délogé de la même manière. Il est cerné, depuis hier matin, dans son palais présidentiel par les 2000 rebelles qui se sont emparés de la capitale N'Djamena. En effet, la rébellion a pris de vitesse le gouvernement tchadien, la France qui le soutient et même les forces européennes (Eufor) devant être déployées dans la région. Les rebelles tchadiens ont mis à exécution leur menace proférée le 21 janvier dernier par leur porte-parole Abderaman Koulamallah. « Le déploiement de l'Eufor est une basse manœuvre du gouvernement français pour tenter de sauver Deby. Qui arrivera en premier à N'Djamena ? Les forces de l'Eufor ou nos forces déterminées au changement ? », a-t-il lancé ce jour-là. Dix jours après, N'Djamena est tombée entre les mains des rebelles qui ont foncé tout droit vers le palais présidentiel où s'est abrité le président Idris Deby Itno. Il leur a fallu moins de trois jours seulement, selon les agences de presse, pour parcourir le pays d'est en ouest (environ 700 km) et prendre le contrôle de la capitale. Appuyés, semble-t-il, par le Soudan, ils n'ont été confrontés qu'à une faible résistance. Tout a commencé jeudi dernier. Une colonne de rebelles tchadiens en provenance du Soudan voisin (accusé de soutenir la rébellion) et composée de quelque 300 pick-up, a traversé en quelques jours le pays d'Est en Ouest sur environ 700 km, évitant l'armée, pour arriver non loin de N'Djamena. Durant la journée de vendredi, les tentatives de l'armée tchadienne de contrecarrer la progression des rebelles dans la région de Massaguet (50 km au nord-est de la capitale) se sont avérées vaines. Entrée hier matin dans la capitale, la rébellion a consolidé son emprise sur N'Djamena au bout de près de trois heures de combats intenses. Dans l'après-midi, seul le quartier de la présidence, où la garde du palais tentait par des tirs à l'arme lourde de desserrer l'étau imposé, échappait encore à leur contrôle. Les chars protégeant l'édifice de la présidence ont été utilisés pour faire reculer l'attaque, sans succès. Les rebelles menaçaient de mener une offensive contre le palais présidentiel et « effectuer le changement » qu'ils voulaient. La situation était hier chaotique et le Tchad était sur le point de connaître un nouveau coup d'Etat. Au moment où nous mettions sous presse, aucun bilan des affrontements n'avait été donné. Alors que les ressortissants des pays étrangers et des employés de l'ONU ont été évacués, deux Saoudiens ont trouvé la mort suite à l'explosion d'une bombe ayant touché l'ambassade d'Arabie Saoudite à N'Djamena. Devant cette situation, l'Union africaine (UA) a « condamné fermement l'attaque » en appelant à « un dialogue constructif entre les parties en conflit ». L'UA, qui a mandaté le président congolais Denis Sassou Nguesso et le guide de la révolution libyenne Maamar El Gueddafi pour trouver une solution négociée à la crise actuelle, a exigé « la cessation immédiate des attaques ». Pour sa part, la France, qui maintient un dispositif militaire dans ce pays, condamne elle aussi « cette tentative de prise de pouvoir par la force au Tchad ». Par la voix de son ministre des Affaires étrangères, Paris a soutenu la médiation engagée par l'UA et a appelé « à l'apaisement et à la réconciliation ».