Le voile se lève sur ce qui s'est passé ces derniers jours à Falloujah réduite en ruines par l'armée américaine. Et encore, ce ne sont jusqu'à présent que quelques bribes de vérités bien américaines, puisqu'aucune source indépendante n'a dressé de bilan sur cette attaque qui a mobilisé d'importants moyens. « Plus de 2085 personnes » sont mortes à Falloujah (50 km à l'ouest de Baghdad) et plus de 1600 autres ont été capturées, a indiqué jeudi le secrétaire d'Etat irakien à la Sécurité nationale Qassem Daoud, en faisant état de l'arrestation d'un chef du groupe de Zarqaoui, tandis que des dignitaires irakiens astreints à l'opposition doutent, quant à eux, de l'existence même de Zarqaoui. M. Daoud n'a pas précisé le nombre de combattants parmi ces morts en raison des problèmes d'identification des corps même si l'armée américaine avait indiqué, le 21 novembre, que 1200 résistants avaient été éliminés. Un tel chiffre avait à l'époque été contesté par l'envoyé spécial d'une agence de presse occidentale, pour la simple raison faisait-il valoir qu'il n'y avait pas autant de résistants. C'est pourquoi, les forces d'occupation et leurs alliés locaux peuvent dire ce qu'ils veulent avec un monopole de fait sur la communication. Ce responsable irakien a ainsi ajouté que « nous avons arrêté, il y a quelques jours, Abou Saïd, l'un des chefs du réseau de Zarqaoui à Mossoul (nord) », sans préciser les liens de cet individu avec Zarqaoui, qui aux premières nouvelles de la bataille de Falloujah, aurait franchi les mailles du filet américain autour de la ville. Cette guerre semble partie pour durer ? Un site Internet a publié hier un communiqué attribué aux résistants de Falloujah annonçant la réorganisation de la guérilla et la reprise des attaques contre les forces américaines et irakiennes. « Après une réorganisation, les moudjahidine ont recommencé, mercredi, à lancer des attaques visant à briser la légende d'invincibilité des forces de la coalition et des traîtres collaborateurs qui sont sous les ordres (du Premier ministre Iyad) Allaoui et du ministre de l'Intérieur Falah Al Nakib », peut-on lire dans ce « communiqué urgent », daté de jeudi et signé du Conseil des moudjahidine, instance qui a dirigé la ville de Falloujah d'avril à novembre. Ce communiqué indique que des accrochages ont eu lieu dans la partie nord de la ville et que « les moudjahidine vont donner, aux collaborateurs qui ont vendu l'Irak, une leçon dont ils se souviendront et vont prouver aux régimes arabes que seul le langage du fusil et du martyre est déterminant ». Au même moment, le secrétaire d'Etat Colin Powell annonçait l'assassinat mercredi, à Baghdad, d'un diplomate américain, Jim Mollen, le deuxième à y trouver la mort après le conseiller de sécurité Ed Seitz, tué dans une attaque au mortier en octobre près de l'aéroport international. Selon le Washington Post, le diplomate, 48 ans, a été tué alors qu'il circulait seul en voiture hors de la Zone verte, sécurisée de Baghdad, où le groupe du Jordanien Abou Moussab Al Zarqaoui a revendiqué l'élimination d'un conseiller américain auprès du ministère irakien de l'Enseignement. Au sud de Baghdad, l'armée américaine a indiqué que 81 suspects avaient été capturés, portant à 116 le nombre total de personnes arrêtées depuis le début de l'opération de mardi. « Les forces irakiennes, américaines et britanniques ont mis la main sur 81 insurgés suspects près de Youssoufiyah, après trois jours d'offensive visant à rétablir la sécurité dans le nord de la province de Babylone », a indiqué l'armée, précisant que cela porte « à 116 le nombre total d'insurgés arrêtés ». L'opération se déroule autour de Latifiyah, de Youssoufiyah, Mahmoudiyah et de Iskandariyah à l'intérieur de la zone communément appelée le « triangle de la mort », où sévissent des groupes armés. Mais à bien regarder, c'est l'Irak qui est le théâtre d'actions de la résistance. Même les zones supposées hautement sécurisées comme la partie septentrionnale n'échappe pas à cette spirale.