Durant ce long week-end de fête consacré aux handicapés, beaucoup d'argent sera dépensé et beaucoup de discours seront prononcés à l'adresse de cette catégorie, pour l'assurer d'une solidarité nationale indéfectible. Une fois les projecteurs éteints, le handicapé reviendra à sa solitude et à sa détresse sociale, dont il est le seul à ressentir la profondeur. Au-delà de la question des moyens et des prises en charge, somme toute cruciale pour le devenir de cette catégorie vulnérable, c'est bien l'hypocrisie sociale qui constitue le véritable obstacle et le frein à toute émancipation. Le handicapé sait que si vraiment il n'était pas différent, comme on s'échine gauchement à l'en convaincre, il n'aurait jamais été nécessaire d'instituer une journée pour le handicapé. Ni les préceptes religieux, ni la morale humaine n'ont réussi à garantir la paix pour ces handicapés, face à l'indifférence, voire la hogra dirigée à leur encontre chaque jour et à chaque coin de rue. Le degré de paupérisation qui lamine toutes les couches sociales, à l'exception d'une minorité rentière, ajoute une louche à la misère et à l'inégalité dont ils souffrent. L'accélération du train de vie quotidien nous fait perdre, à nous autres, le sens des valeurs et la faculté intellectuelle et humaine capables de nous faire avancer sur la question. A force de nous replier sur nous-mêmes, non seulement nous nous sommes détournés des plus vulnérables d'entre nous, mais c'est comme si une suffisance générale s'était développée pour constituer la seule valeur. En ceci, le véritable handicap est en nous.