Après avoir été portée dans la rue, la crise politique ukrainienne s'est « enfermée » au Parlement qui a suspendu hier l'examen d'une motion de défiance à l'encontre du Premier ministre, Viktor Ianoukovitch, L'opposition avait pour sa part repris hier le blocus du bâtiment officiel, exigeant des députés une reprise nocturne des travaux. Alors qu'il était prévu que les députés reprennent leurs discussions qu'aujourd'hui avec un « texte bien pesé et concerté », a annoncé le président du Parlement Volodymyr Litvine. Plusieurs centaines de manifestants ont passé les barrières de sécurité dressées par les forces de l'ordre devant le Parlement et sont arrivés aux portes du bâtiment en scandant : « Le gouvernement dehors ! » Il a fallu que le président de l'institution et des députés de l'opposition exhortent les manifestants à ne pas assiéger de nouveau le Parlement. Le leader de l'opposition, Viktor Iouchtchenko, a réclamé la démission du gouvernement Ianoukovitch lors d'un discours devant le Parlement. « Le gouvernement doit donner sa démission pour les idées (d'autonomie) répandues dans l'est du pays, pour sa mauvaise gestion du budget, pour les fraudes » lors de la présidentielle, a déclaré à la tribune M. Iouchtchenko. « C'est vous qui divisez l'Ukraine », a-t-il poursuivi en s'adressant à des membres du gouvernement présents dans la salle. Il a de nouveau accusé les autorités d'avoir cherché à faire un « coup d'Etat » lors de cette élection que l'opposition a contestée devant la Cour suprême. Il convient également de signaler qu'il a rejeté les propositions du Premier ministre sortant dont il conteste la victoire à la présidentielle, à savoir celles d'organiser une nouvelle élection avec de nouveaux candidats ou encore d'accepter d'être son Premier ministre en cas de validation des résultats du scrutin par la Cour suprême de Kiev. En d'autres termes, Ianoukovitch a tout simplement proposé un partage du pouvoir à son adversaire. Le Haut représentant pour la politique étrangère de l'UE, Javier Solana, devait pour sa part se rendre une seconde fois à Kiev pour une nouvelle tentative de médiation, a annoncé le ministre néerlandais des Affaires étrangères, Bernard Bot, en estimant « nécessaire » la tenue d'une nouvelle élection. Javier Solana se rend donc à Kiev, où il s'entretiendra avec « toutes les parties concernées », avant de gagner Moscou, a expliqué le ministre à des journalistes, en marge de la réunion ministérielle euroméditerranéenne Euromed. « Nous pensons qu'il serait nécessaire d'avoir de nouvelles élections » présidentielles en Ukraine, a poursuivi Bernard Bot. Rappelons enfin que, dès lundi, le président sortant ukrainien Léonid Koutchma s'était déclaré en faveur d'une nouvelle élection pour sortir de la crise. Une crise dans laquelle l'opposition pro-occidentale dirigée par Iouchtchenko ne voit d'issue que dans la disqualification de Ianoukovitch. D'autant que les pressions des Etats-Unis et de l'Union européenne sont de plus en plus lourdes pour Kiev menacée d'être privée de toute aide économique et financière occidentale dans le cas de la confirmation de la victoire du Premier ministre sortant. Cette opposition accuse également le pouvoir et le gouvernement d'avoir des ambitions séparatistes pour l'est du pays. Une telle démarche cache mal les réelles intentions de Iouchtchenko et de ses partisans qu'ils s'évertuent à prêter au pouvoir et au gouvernement en place.