Dans l'attente du verdict de la Cour suprême, le ton monte entre les deux parties en conflit autour du résultat de la présidentielle. Poursuivant la mobilisation de ses partisans, l'opposition a continué hier d'occuper les places fortes de la capitale et des principales villes du pays. Quoique se déroulant de manière encore pacifique, les choses semblent menacer cependant de prendre une autre tournure, notamment après l'annonce de l'organisation, le 15 décembre prochain, d'un référendum dans la partie russophone de l'Ukraine. Fait dimanche à Donetsk, lors d'un congrès régional tenu dans cette région russophone, par les partisans de Victor Ianoukovitch, le président autoproclamé et contesté des élections présidentielles ukrainiennes, introduit un nouvel élément de dérapage dans le bras de fer Ianoukovitch-Iouchtchenko. Cette annonce de l'organisation d'un référendum sur «l'autonomie» de la région russophone de Donetsk a jeté un froid et fait planer la menace de partition du pays. Ce qui a fait réagir hier le président sortant Léonid Koutchma, selon lequel une partition de l'Ukraine est «inacceptable», indiquant: «Nous ne pouvons accepter, en aucun cas, la partition de l'Ukraine, même si je comprends que de tels désirs existent», a déclaré M.Koutchma. Ceux qui prônent le séparatisme, ajoute le président ukrainien sortant face aux caméras de la télévision, «doivent savoir qu'ils en porteraient la responsabilité devant le peuple ukrainien». En effet, la déclaration du congrès de Donetsk sur le référendum séparatiste, auquel assistait le candidat du pouvoir, Victor Ianoukovitch, constitue le premier dérapage depuis l'ouverture de la crise ukrainienne autour du résultat contesté de l'élection présidentielle remportée par le candidat du pouvoir. L'assemblée régionale de Donetsk, place forte du candidat Viktor Ianoukovitch dans l'est de l'Ukraine, a décidé d'organiser un référendum pour l'obtention «d'une plus large autonomie», a rapporté l'agence Interfax. Dans cette résolution adoptée par le congrès et rendue publique dimanche soir, il y est dit que «si un président illégitime arrive au pouvoir, les participants au Congrès se réservent le droit de prendre des mesures adéquates pour l'autodéfense des intérêts des citoyens». «Au cas où la crise politique se développerait de la pire façon, nous serons unis et fermes (...) jusqu'à organiser un référendum sur un éventuel changement de statut administratif territorial de l'Ukraine». L'opposition a évidemment immédiatement réagi, donnant au président Koutchma 24 heures pour «limoger» le Premier ministre Ianoukovitch, vainqueur contesté des élections. Dans l'impasse ainsi créée par cet imbroglio, la Cour suprême, dans l'attente d'étudier la plainte déposée par l'opposant Victor Iouchtchenko, et avant de rendre son verdict, avait pris une mesure conservatoire par le gel des résultats du second tour de l'élection du 21 novembre dernier. L'opposition, plus que jamais solidaire avec son leader, serre les rangs et maintient sa mobilisation se disant plus que jamais déterminée à obtenir gain de cause, considérant son candidat, M.Iouchtchenko, comme étant le vrai vainqueur de la consultation électorale. Aussi, la décision de la Cour suprême est-elle fort attendue, d'autant plus qu'en se prononçant pour l'invalidation du scrutin et l'annulation de ses résultats, le Parlement - pourtant dominé par des députés politiquement proches de M.Ianoukovitch - semble avoir balisé le terrain, ouvrant la voie à l'organisation de nouvelles élections, de même qu'il a indiqué la voie à suivre pour dépasser la crise, née de la controverse autour des résultats de la présidentielle. Les opposants massés devant le bâtiment de la Cour suprême attendent un verdict qui, selon sa teneur, peut apaiser ou aggraver la crise. Prudente et ne s'engageant ni dans un sens ni dans l'autre, la porte-parole de la Cour suprême, Liana Chlopochnikova a déclaré, hier devant la presse, que «théoriquement, la décision doit être prise dès aujourd'hui (hier), mais l'examen de la plainte peut durer plusieurs heures ou plusieurs jours». De fait, il est invraisemblable que le verdict tombe avant, dans le meilleur des cas, aujourd'hui, la Cour suprême se donnant le temps d'étudier tous les tenants et aboutissants de l'affaire sans précipitation et rendre, sans précipitation, un verdict qui n'amène pas à son tour à la contestation et la controverse.