L'Algérie n'a pas les moyens de faire face à une marée noire. Ce constat dramatique a été fait hier par un représentant du Commissariat national du littoral, invité à un séminaire sur le rôle de la Gendarmerie nationale dans la protection de l'environnement. « Dans l'état actuel des choses, la lutte contre la pollution marine est une obligation de moyens pour garantir des résultats. Au niveau national, nous n'avons pas de moyens de lutte contre ce type de pollution », indique M. Kemmache, en notant que l'Algérie ne dispose que de petits moyens de lutte contre les cas de fuite au niveau des côtes ou des trois ports pétroliers. « Si une catastrophe venait à se produire dans le large, nous n'aurions pour seule solution que de faire appel à nos voisins du Nord qui sont équipés en moyens importants dont la task force et qui maîtrisent des techniques comme le booms et les skimmers. Ce qui va nous coûter très cher », explique ce responsable en réponse à une question d'un responsable de la gendarmerie. M. Kemmache estime que la société créée par Sonatrach dans le cadre de la lutte contre les pollutions marines ne peut répondre à des atteintes écologiques, telle une marée noire provoquée par le naufrage d'un pétrolier. Pays pétrolier par excellence, l'Algérie n'est pas à l'abri d'une catastrophe d'une telle ampleur, surtout avec les caprices de plus en plus démonstratifs de la mer. Ses ports pétroliers sont le théâtre de mouvements de navires bondés d'hydrocarbures qui traversent la Méditerranée en direction des ports du monde. Si la sécurité à bord des navires peut être irréprochable, la colère de Poséidon est quant à elle imprévisible. S'il est utile de prier Dieu pour qu'il nous préserve d'un scénario catastrophe, il sera tout aussi utile de consacrer une enveloppe conséquente pour outiller les instruments de lutte contre les pollutions marines. Des pollutions qui peuvent survenir d'autres rivages comme en 1991 avec le naufrage du pétrolier chypriote Haven au large de Gênes et dont le déversement d'hydrocarbures a atteint même les côtes algériennes. Il est utile de souligner que rien qu'en Méditerranée, 93 ports pétroliers sont recensés et que six millions de tonnes de pétrole sont déversés chaque année dans les océans. « La marée noire n'est pas quelque chose de fixe, pas dans un premier temps du moins. Sa dynamique de propagation et sa durée dépendent de nombreux facteurs que l'on ne maîtrise pas toujours », explique M. Kemmache en notant aussi que « l'essentiel reste de s'en protéger en effectuant des contrôles réguliers et stricts sur les différents moyens qui acheminent les hydrocarbures d'un endroit à l'autre. Il faut également rester attentif aux différents signes qui trahissent la présence d'une pollution de ce type (oiseaux mazoutés, coquillages contaminés...) et protéger au mieux ces écosystèmes marins qui sont habituellement si discrets et souvent peu connus ». 399 atteintes à l'environnement en 2007 Dans le cadre de son exercice de lutte contre les atteintes à l'environnement, la Gendarmerie nationale a enregistré durant l'année écoulée une baisse des infractions et fait tout de même état de 399 affaires liées aux atteintes à l'environnement. Pas moins de 83% de ces affaires, soit 291, concernent l'extraction et l'enlèvement de sable sans autorisation, contre 47 affaires liées aux forages illicites de puits. Ces opérations ont mené à l'arrestation de 606 personnes. Les délits de chasse totalisent quant à eux 14 affaires ayant mené à l'arrestation de 46 personnes. Parmi les délits de chasse les plus répandus, le bilan de la gendarmerie fait état de la destruction, la capture et la vente d'animaux d'une espèce protégée. En vue de renforcer le travail de lutte contre les agressions de l'environnement, le commandement de la GN a décidé de créer de nouvelles cellules de protection de l'environnement afin de mieux gérer les opérations d'intervention. Et de réactiver les brigades du littoral devant être accompagnées du lancement du projet d'élaboration d'un système d'information géographique propre à l'environnement en Algérie. La gendarmerie propose aussi de constituer un fichier des espèces animales protégées. « Par méconnaissance de ces espèces, les gendarmes laissent passer au niveau des frontières certains animaux. Donc, ce document nous permettra de mettre à la disposition de nos équipes les différents identifiants des animaux protégés », expliquent des responsables au niveau du département environnement de la GN. Une préoccupation qui a fait réagir dans le débat un enseignant de l'INA qui déplore l'absence de loi protégeant le patrimoine génétique algérien, « les gènes sont pillés en toute liberté alors que les gènes sont devenus des armes qu'on nous renvoie sous forme de semences contaminées, ou d'abeilles malades. Si l'Algérie ne se prémunit pas par la protection de son patrimoine vivant, elle subira un réel danger avec l'ouverture des frontières commerciales ». Dans un point de situation établi par le ministère de l'Environnement, 41 zones exposées sont soumises à des risques environnementaux particuliers en Algérie. Parmi les zones sensibles sont recensées 32 îles et 208 îlots, 26 zones humides, 54 dunes et cordons dunaux, 138 forêts, 71 aires marines et terrestres d'intérêts écologiques et 33 sites, paysages terrestres et marins remarquables.