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La montée des dangers
SAUVEGARDE DU LITTORAL ALGERIEN
Publié dans L'Expression le 28 - 06 - 2009

Il s'agit de faire état du décalage très important qui existe dans notre pays entre les textes et la réalité.
L'Algérie n'est pas le seul pays méditerranéen, il s'en faut de beaucoup, dont le littoral est menacé de façon permanente par l'érosion marine, les mouvements géomorphiques naturels et surtout les processus anthropiques constitués par l'urbanisation accélérée, la pollution, la démographie, le développement des activités industrielles et touristiques. Il faut rendre justice au législateur d'avoir adopté la loi du 5 févier 2002 relative à la protection et à la valorisation du littoral et la loi du 19 juillet 2003 relative à la protection de l'environnement dans le cadre du développement durable. Notre pays est en outre partie aux principales conventions relatives à la protection de l'environnement marin (Convention de Barcelone de 1976 modifiée en 1995, Convention de Montégo Bay sur le droit de la mer de 1982, Convention sur la diversité biologique de 1992, Protocole relatif à la Gestion intégrée des zones côtières de janvier 2008, Convention Ramsar sur les zones humides, etc.) ainsi qu'à l'ensemble des instruments instaurant la gestion durable des territoires côtiers (Plan d'action pour la Méditerranée, Plan bleu, Initiative Horizon 2020 et surtout Stratégie méditerranéenne pour le développement durable). Force est encore d'admettre que l'ensemble de ces conventions et de ces programmes ne sont pas pleinement effectifs, y compris dans les pays qui en ont été les plus ardents promoteurs, en raison de la difficulté objective à promouvoir des modes de production et de consommation respectueux de l'environnement marin et permettant de préserver les écosystèmes. Il ne s'agit évidemment pas d'apprécier les efforts entrepris par les autres pays méditerranéens pour réduire les menaces et les vulnérabilités de leurs littoraux respectifs et pour concilier préservation du littoral et développement durable. Il s'agit plus modestement de faire état du décalage très important qui existe dans notre pays entre les textes et la réalité, l'absence de mise en oeuvre de la loi de 2002 (malgré les efforts considérables déployés par le ministre du secteur) et de souligner la montée des dangers qui menacent le littoral algérien dans lequel se concentre une partie substantielle de la population algérienne.
L'existence d'une instrumentation juridique adaptée
L'adoption de la loi du 5 févier 2002 puis de la loi du 19 juillet 2003 auguraient d'une politique volontariste de préservation du littoral algérien, à la fois parce que celui-ci représente un outil de développement économique, qu'il exprime des besoins sociaux et surtout qu'il répond à des préoccupations écologiques irrépressibles. Aucune politique d'aménagement territorial n'est concevable si elle fait litière des facteurs objectifs suivants: l'étendue de nos côtes (1200 km), le nombre de wilayate impliquées (14), le fait que 48% de la population algérienne vivent sur une bande côtière située entre 50 et 60 km de profondeur (la densité de la population dans la région littorale est de 300ha/ km² contre 10 ha/ km² dans le reste du pays). Plus de 7500 unités industrielles représentant plus de 55% du parc industriel national y sont implantées. Nous n'avons pas été capables en 50 ans d'indépendance de faire du littoral algérien le plus fabuleux outil de promotion de notre développement. On doit cependant signaler quelques opérations parmi lesquelles le Système d'information géographique (SIG), l'identification des zones humides (en attendant leur cadastrage), la création d'un Commissariat national du littoral et quelques actions de coopération essentiellement avec le Conservatoire français du Littoral et des rivages lacustres. La délimitation du littoral et l'ensemble des actions d'intégration des entités qui y vivent ressortissent des Commissions intersectorielles de wilaya (CIW). Quel bilan peut-on en dresser aujourd'hui? Il est évident que la préservation du littoral ne repose pas sur la seule bonne volonté du ministère chargé de l'Environnement. Il faut une coordination intersectorielle au niveau le plus élevé de l'Etat, l'engagement des collectivités locales et un rôle plus important des ONG. En 2009, le constat est accablant. Il s'appuie sur les données suivantes: réduction à la portion congrue des espaces côtiers, poursuite du bétonnage des côtes, augmentation des flux touristiques (essentiellement pendant la période estivale), urbanisation linéaire largement favorisée par le laxisme et la corruption des autorités locales, absence de coupures vertes agricoles et boisées, de sorte à restreindre l'impact de l'urbanisation sauvage. Il est plus que jamais indispensable d'opérer un véritable délestage du littoral pour encourager le développement de la Pêche et de l'Agriculture. C'est dans l'arrière-pays (notamment dans le Sud) que devra être promu le tourisme durable d'autant que notre pays est contraint de s'engager dans la revitalisation de la région des Hauts- Plateaux et du Sud, sauf à voir, à l'horizon 2020, 80% de la population algérienne s'installer sur une étroite bande côtière dans les conditions les plus calamiteuses qui soient (accroissement de la pollution, impossibilité de gérer les déchets, prolifération des eaux usées, consommation d'eau en croissance surexponentielle). L'Algérie a signé le Protocole relatif à la gestion intégrée des zones côtières (Gizc), adopté en janvier 2008 à Barcelone. Celui-ci, lorsqu'il entrera en vigueur (probablement en 2010), imposera à l'Algérie des obligations particulièrement lourdes que notre pays aura le plus grand mal à assumer. D'abord qui dit Gizc, dit processus dynamiques de gestion et d'utilisation durable des zones côtières. La gestion et l'utilisation des ZC supposent la prise en compte de la fragilité des écosystèmes, des paysages côtiers, le nombre des activités, les usages multiples auxquels elles donnent lieu, leurs relations réciproques et leur impact sur la partie marine et la partie terrestre.
Les principaux objectifs auxquels l'Algérie a souscrit sont les suivants:
a) préserver les ZC pour les générations futures;
b) utiliser durablement les ressources naturelles (notamment l'eau);
c) garantir l'intégrité des écosystèmes côtiers;
d) faciliter le développement durable des ZC en conciliant deux impératifs a priori contradictoires: prise en compte de l'environnement et des paysages d'un côté, les exigences du développement économique, social et culturel de l'autre;
e) réduire les effets des changements climatiques par une intervention efficace sur les activités naturelles ou humaines;
f) mettre en cohérence les actions menées par la puissance publique et celles relevant de l'initiative privée, de sorte que l'utilisation de la ZC soit optimale en matière de protection du littoral.
L'insuffisance de volontarisme politique
Il est peu vraisemblable que ces objectifs soient atteints si au préalable un certain nombre d'outils et d'instruments juridiques et opérationnels ne sont pas mis en oeuvre. Depuis l'adoption de la loi du 5 février 2002, on doit déplorer l'absence de politiques sectorielles dans tous les domaines. Ainsi, il n'existe aucune approche écosystémique dans l'aménagement et la gestion des ZC. Ainsi également de l'absence totale d'implication des populations et de la société civile dans la mise en oeuvre d'une gouvernance transparente des ZC. Ainsi encore de l'absence d'une coopération institutionnelle intersectorielle entre les administrations et les pouvoirs locaux compétents, à telle enseigne que ces derniers tentent de s'affranchir, dans l'arbitraire le plus total et le plus impuni, des principales obligations qui sont à leur charge en vertu de toutes les lois pertinentes. Last but not least, aucune évaluation préalable des risques associés aux activités humaines et ceux liés aux infrastructures dans le but de prévenir ou de réduire leurs impacts négatifs sur les ZC n'a été entreprise jusqu'ici. Dans le programme du président de la République, la préservation du littoral constitue une des préoccupations centrales du pouvoir politique. L'exploitation des ressources halieutiques qui a été littéralement abandonnée aux puissances maritimes hauturières (à travers leurs navires usines) doit redevenir un des objectifs du développement de nos populations. C'est à l'Etat et aux collectivités locales de donner l'impulsion en prenant diverses dispositions:
a) orienter les activités industrielles hors des zones où les écosystèmes et paysages côtiers risquent d'être le plus fragilisés;
b) inciter les producteurs à recourir à des pratiques de pêche qui ne malmènent pas les zones de pêche et qui permettent l'utilisation durable des ressources marines naturelles;
c) développer l'aquaculture en veillant à ce que les zones aquacoles soient protégées et que l'utilisation d'intrants et le traitement des déchets soient normalisés;
d) limiter au minimum minimorum les activités touristiques sur les ZC, la pêche de loisir et les activités sportives;
e) soumettre l'utilisation de l'eau de mer dans les usines de dessalement à des approbations préalables strictes;
f) interdire définitivement l'extraction de sable et des sédiments fluviaux car celle-ci a déjà engendré des effets extrêmement nocifs et hélas durables sur les systèmes côtiers;
g) renforcer la surveillance des aquacoles côtiers et des zones de contact entre eaux douces et eaux salées en raison de l'extraction des eaux souterraines et des rejets dans le milieu naturel.
La nécessité de s'inspirer des expériences étrangères
D'une façon générale, l'ensemble des infrastructures, installations énergétiques et ouvrages maritimes ne peuvent être autorisés qu'après vérification de leur impact sur les écosystèmes, les paysages et surtout la géomorphologie de la côte. L'Algérie présente des écosystèmes côtiers particuliers qu'il est impératif de préserver: zones humides et estuaires, habitats marins (HM), zones boisées du littoral et enfin dunes. Certes, en vertu de la loi du 5 février 2002, des mesures ont été prises pour réglementer voire interdire les activités susceptibles d'impacter négativement sur les ZH et les estuaires. Mais, à ce jour, les pouvoirs publics n'ont pas entrepris la remise en état des ZH dégradées, de sorte que celles-ci ne jouent plus de rôle positif dans les processus environnementaux côtiers envisagés dans les lois sur l'environnement. S'agissant des habitats marins (HM), il est désormais impératif que l'Algérie prenne des mesures pour protéger les ZC qui abritent des HM et des espèces dont la préservation est indispensable au maintien des écosystèmes. Il est également urgent que notre pays coopère avec l'ensemble des pays de la Méditerranée pour l'élaboration de projets communs de protection des HM. Il faut savoir qu'entre 1980 et 2008, la production de l'aquaculture a été multipliée par 6,8 en Méditerranée et en mer Noire, que des pays comme la Grèce et la Turquie ont enregistré un taux de croissance annuel de la production de loup de mer et de dorade de près de 30%, ce qui représente environ 75% de la production acquafère globale en Méditerranée. Dans notre pays, les données sur l'aquaculture ne sont même pas connues. Ce qui, en revanche, est avéré, c'est le coût exorbitant du poisson bleu censé être pêché à proximité de nos côtes (alors qu'il constitue une composante essentielle de l'alimentation de nos enfants qui en sont majoritairement privés) et qu'il est vendu à l'intérieur même de notre mer territoriale à des pêcheurs étrangers et cela en violation de tous les textes de loi. Il est, en tout cas, inacceptable que des pratiques aussi scandaleuses puissent perdurer alors que la Tunisie (avec 1300 km de côtes) possède des réserves stables de poisson bleu (112.000t) dont une partie est exportée vers l'Algérie.
Reste le sort des forêts et zones boisées du littoral. Les société agroforestières qui constituent des EPE (les Safa) ont pour vocation de protéger les bassins versants, l'extension du patrimoine forestier, la lutte contre la désertification, la mise en valeur des terres, l'exploitation forestière, enfin la production de plants forestiers, fruitiers à tous les étages bioclimatiques. La circonstance que leur privatisation ait été envisagée souligne assez l'absence de vision globale du développement durable chez certains de nos responsables. La cession de ces entreprises à des repreneurs privés porte en germe la remise en cause totale des objectifs assignés originellement aux Safa. Une chose est de prendre acte des défaillances des Safa dont les causes doivent être objectivement analysées, autre chose est de laisser entendre que le désengagement de la puissance publique des activités agro-sylvo-pastorales permettra la préservation des ressources forestières qui sont indispensables à la protection du littoral. Le reboisement, le développement des zones steppiques comme la densification forestière du littoral ne sauraient être laissés à l'initiative privée, à supposer même que l'Etat disposât des moyens de faire exécuter un cahier des charges contraignant. Aussi bien, seuls le renforcement des moyens mis à la disposition des Safa et la contractualisation des objectifs avec l'Etat (sous forme de contrat de plan) seraient de nature à transformer ces entités en instruments d'une politique de développement durable et de protection du littoral, ce qu'à l'évidence, des promoteurs privés seraient dans l'impuissance de garantir. Plutôt que de se lancer dans une stratégie industrielle parsemée d'aléas et en tout état de cause fort coûteuse pour les finances publiques, ne serait-il pas plus réaliste pour notre pays de «prioriser» le littoral et d'en faire un outil du développement économique et social dont les bienfaits retentiraient directement sur 75% de la population algérienne à l'horizon 2025. Il faut savoir que le nombre d'emplois directs et indirects (ce qu'un audit impartial confirmerait) créés par le développement de l'aquaculture, la pêche, la valorisation des ressources marines, les activités forestières et l'agriculture dans les zones adjacentes au littoral serait de beaucoup supérieur à celui que l'industrie serait capable de générer, d'autant que notre pays ne dispose plus du moindre avantage comparatif par rapport aux autres pays méditerranéens dans le domaine industriel. Il suffit de mettre en oeuvre le programme du président de la République qui insiste beaucoup sur l'exploitation rationnelle de nos ressources halieutiques. C'est au prix des mesures suggérées plus haut que cet objectif sera atteint. Gageons que le président de la République et son gouvernement s'engageront à porter le fer au plus profond de la plaie, car il y a urgence.
(*) Professeur d'université


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