Le rassemblement était organisé en solidarité avec les deux journalistes détenus, Mohamed Benchicou et Hafnaoui Ghoul. Il était midi lorsque des professionnels de médias, des représentants de syndicats autonomes, des hommes politiques, des délégués des archs, des intellectuels et d'autres personnalités du mouvement associatif ont fait leur apparition sur le lieu du rassemblement. Ainsi, nous pouvions distinguer la présence du secrétaire général du PST, M. Chawki Salhi, MM. Karim Tabou et Chafaâ Bouiche du FFS, M. Brerhi et le commandant Azzedine du CCDR, des membres du MDS, l'ancien ministre de la Communication et de la Culture, M. Abdelaziz Rehabi, les secrétaires généraux des syndicats autonomes, en l'occurrence le CLA et le CNES. Autre présence remarquée : les représentantes de l'Association des victimes du terrorisme. De petits groupes ont commencé alors à se former autour des discussions se rapportant au harcèlement juridico-financier que subit la presse indépendante et à l'emprisonnement des journalistes. Des pancartes sur lesquelles sont inscrits des slogans revendicatifs de la libération des journalistes sont brandies par des membres du collectif du Matin. Présents à cet effet, des animateurs du collectif Code de la famille 20 ans barakat ont procédé à un lâcher de 1000 ballons (aux couleurs rouge et noir) portant l'inscription : « Libérez les détenus du combat démocratique. » Autour du lieu du rassemblement, des policiers étaient postés en grand nombre, mais avec une discrétion totale. Avant l'entame des interventions, une minute de silence a été observée à la mémoire des martyrs de la guerre de Libération et des journalistes assassinés durant la période du terrorisme et de la violence. Prenant la parole, le secrétaire général du SNJ, M. Rabah Abdellah, a soutenu que « l'Algérie aurait pu être en démocratie et un Etat de droit. Or en 2004, des journalistes sont jetés en prison ». Ajoutant : « Nous sommes là pour protester contre les harcèlements que subit la presse. » Celui-ci a souhaité que le combat et la mobilisation pour la liberté d'expression soient maintenus. Mme Ghania Khelifi, pour sa part, a rendu un hommage aux journalistes assassinés et a remercié pour leur courage « les journalistes qui subissent la mafia locale ». « Nous leur disons, a-t-elle dit, que quel que soit le harcèlement, la presse est à leur côté. » Prenant la parole au nom du comité national pour la libération de Benchicou et Ghoul, le directeur de publication d'El Watan, M. Omar Belhouchet, s'est dit « extrêmement joyeux » de voir une aussi importante assistance au rassemblement. « C'est ce genre de mobilisation qu'il faut », a-t-il dit avec un air satisfait. M. Belhouchet s'est dit, par ailleurs, optimiste quant à l'amélioration dans un proche avenir des rapports pouvoir-presse. « J'ai bon espoir à ce qu'il y ait amélioration des rapports avec les autorités », a-t-il estimé. A signaler que des éditeurs et des journalistes de la presse ont été reçus, avant-hier, par le ministre de la Communication, M. Boudjemaâ Haïchour, qui a exprimé sa volonté de mettre des « passerelles » à même de rétablir les rapports entre la presse et le pouvoir. M. Haïchour s'était dit ainsi « peiné » de voir des journalistes traînés devant les tribunaux. Rencontré sur les lieux, l'un des membres du collectif des avocats de la défense de Benchicou, Me Hanoune Salah, a estimé que « la journée d'aujourd'hui est une occasion pour dire que l'indépendance de l'Algérie est toujours un leurre ». Me Hanoune argumente cela par le fait qu'« en 2004 le pouvoir continue toujours à réprimer les militants de la citoyenneté et à emprisonner des journalistes pour délit d'opinion ». 13h passées, une gerbe de fleurs est déposée à la mémoire de tous les martyrs de la corporation. La foule s'est dispersée dans le calme sous les regards des policiers. Par ailleurs, La nouvelle citation à comparaître de Mohamed Benchicou ainsi que celle de la journaliste Abla Cherif, aujourd'hui au tribunal de Sidi M'hamed, sont considérées par Me Hanoune comme étant « une tentative supplémentaire de réprimer davantage et pour charger encore plus Benchicou et le journal Le Matin ». Pour cet avocat du collectif de défense du directeur de publication du Matin, « les faits relevés par Le Matin concernant la torture à T'kout sont une réalité palpable ». Pour lui, le procès d'aujourd'hui nous permettra de transposer le débat sur la torture sur la place d'Alger.