L'Algérie doit déployer des efforts supplémentaires pour répondre à de nouvelles questions posées par les Etats-Unis et l'Union européenne en vue de son accession à l'Organisation mondiale du commerce (OMC). A Accra, capitale du Ghana, on ne sait pas ce qu'a dit Ahmed Ouyahia, représentant personnel du président de la République, à Pascal Lamy, directeur général de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), en marge des travaux de la 12e session de la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (Cnuced). « Pour donner un contenu réel à l'intégration du Sud dans le système multilatéral de commerce, il y a lieu de ne pas astreindre les pays en développement, candidats à l'adhésion à l'OMC, à plus d'obligations que celles contractées par d'autres pays en développement déjà membres de cette organisation, afin que les engagements qu'ils auront ainsi à souscrire ne soient pas handicapants pour leur développement », a écrit Abdelaziz Bouteflika à cette conférence. L'Algérie est parmi les rares pays africains non membres de l'OMC. A Alger, on sait, par contre, qu'il faut s'armer « d'arguments percutants » pour venir à bout des négociations relancées en 2001 avec l'OMC. Les mots sont de Cherif Zaâf, chef négociateur, qui a détaillé le processus d'accession hier au siège du Conseil de la nation, lors d'un séminaire organisé conjointement par la chambre haute du Parlement et la Cnuced. L'Algérie doit répondre encore à un paquet de questions posées principalement par les Etats-Unis et l'Union européenne (UE) qui ont, après des discussions menées à Genève en janvier 2008, envoyé une liste additionnelle d'interrogations. « Les choses commencent à se décanter. Le nombre des membres de l'OMC a été réduit », a dit, avec optimisme, Cherif Zaâf qui s'est caché derrière « l'obligation de réserve » pour ne pas dire trop. Il a promis un rapport détaillé dans les prochains jours à présenter au comité gouvernemental en charge de suivre les négociations avec l'OMC. Selon lui, les départements ministériels et « les secteurs concernés » préparent les réponses. « Dès que nous avancerons, on vous donnera des informations », a promis le chef négociateur. « Nous avons des efforts supplémentaires à faire dans les négociations bilatérales. Il y a encore des concessions à faire », a-t-il soutenu. Selon Nobert Lebalé, chef économiste à la Cnuced, l'organisme onusien aide l'Algérie à répondre à ces questions, même sur le fond. « La Cnuced a un programme d'assistance technique qui comprend plusieurs étapes. La première est relative à la rédaction du mémorandum sur le régime du commerce extérieur et les aides. La deuxième est de répondre aux questions posées par les membres de l'OMC. Nous connaissons les règles et nous permettons aux pays candidats à l'adhésion d'éviter les pièges », a-t-il expliqué. La Cnuced, qui assiste les pays à préparer les études sectorielles et à détecter l'importance des enjeux, a aidé l'Algérie à élaborer des documents sur l'agriculture, les services, la propriété intellectuelle et les licences d'importation. En plus de l'Algérie, la Cnuced a assisté la Russie sur la question sensible du prix intérieur du gaz. « L'accession de la Russie est bloquée à cause de ce point précis », a indiqué Nobert Lebalé. L'Arabie Saoudite, qui a accepté de réduire la marge entre les prix intérieurs et extérieurs du gaz, et Oman ont également sollicité l'appui de la Cnuced. « Nous avons fait la preuve mathématique que les prix intérieurs du gaz couvrent largement les coûts de production », a précisé, de son côté, Cherif Zaâf, qui a souligné le refus de céder sur cette mesure. « Si l'Algérie accédait avant le bouclage du cycle de négociation de Doha, il y a des obligations qu'elle n'aurait pas à supporter. L'Algérie, qui n'est qu'observateur, ne participe pas à ce cycle », a relevé Nobert Lebalé. Le cycle de Doha, qui devait être bouclé en 2007, avance à petits pas à cause de la question des subventions agricoles. La crise alimentaire actuelle pourrait ajouter de l'eau au moulin des pays européens, dont la France, qui ne veulent pas céder sur les subventions. L'Algérie, d'après le représentant de la Cnuced, a bien négocié l'offre agricole. Selon Saïd Djellab, un des négociateurs, 85% des mesures agricoles sont autorisés par le système OMC. Reste que l'Algérie n'est pas un grand exportateur agricole, d'où la flexibilité dans les pourparlers. Qu'en est-il des services (télécommunications, banques, transports, tourisme, etc) ? « C'est un chantier où même les pays membres de l'OMC sont en pleins travaux », a répondu Cherif Zaâf. L'Algérie, selon lui, a pris des engagements sur les onze secteurs des services prévus par la nomenclature de l'OMC. L'accord général sur le commerce des services (AGCS) de l'OMC, applicable depuis 1995, prévoit une libéralisation progressive des services. « La négociation se fait secteur par secteur. Chaque pays décide du temps et des conditions d'ouverture. Il faut se doter d'une législation nationale avant toute libéralisation. Chaque pays a négocié à sa façon et a obtenu des résultats selon son poids », a indiqué Nobert Lebalé. Des membres influents de l'OMC ne comprennent pas pourquoi l'Algérie continue d'imposer le fermeture totale du secteur audiovisuel (radios et télévisions). Le représentant de la Cnuced a précisé que chaque pays peut refuser l'ouverture en donnant des arguments. Toutefois, il y a un risque : la règle du consensus fait que si un membre refuse l'accession d'un pays à l'OMC, celle-ci n'aura pas lieu. Saïd Djellab, un négociateur, a déclaré à la presse que l'aspect lié à l'audiovisuel n'a pas encore été abordé.