Une personne, au moins, est enlevée chaque jour en Algérie. Le chiffre, à la fois effarant et effrayant, a été donné par Noureddine Yazid Zerhouni, ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, jeudi devant le Conseil de la nation, en réponse à une question orale d'un sénateur qui voulait savoir comment l'Etat compte faire face à ce fléau. Le ministre a indiqué que le nombre de personnes kidnappées au cours de 2007 s'élève à 375. Ces statistiques renseignent sur l'ampleur de ce phénomène, qui semble devenir un véritable « business » dans lequel versent les groupes terroristes pour « se financer ». D'ailleurs, M. Zerhouni fera remarquer que « 115 cas ont une relation avec le terrorisme ». Les autres enlèvements relèvent, précise-t-il, du droit commun. Les bandits ou les groupes terroristes qui opèrent de tels enlèvements exigent souvent de fortes sommes d'argent. Le montant global exigé l'année dernière par les ravisseurs s'élevait à 6 milliards de dinars dont 1,2 milliard ont été versés par les familles ou proches des victimes. M. Zerhouni a affirmé que les rançons ont été toutes réclamées par des terroristes. D'autres personnes auraient été kidnappées soit par des groupes de pédophiles soit par des trafiquants d'organes. La Gendarmerie nationale a, à titre de rappel, arrêté en avril dernier à l'ouest du pays un groupe de personnes soupçonnées d'être impliquées dans un réseau de trafic d'organes basé au Maroc. Devant l'inquiétude des sénateurs, M. Zerhouni s'est montré moins rassurant, reconnaissant que le gouvernement trouve des difficultés à faire face à ce phénomène, surtout lorsque cela est lié à la pédophilie ou à l'inceste. Le ministre explique que la majorité des familles ne dénonce pas de tels cas en raison du poids de la tradition. De peur qu'un scandale arrive ! Les chiffres de la Gendarmerie nationale indiquent que 108 mineurs ont été enlevés durant l'année dernière. D'autres statistiques officielles font état de la disparition de 841 enfants depuis 2001, âgés de 4 à 16 ans. S'il n'est pas nouveau, ce phénomène a pris une ampleur des plus inquiétantes. En 2001, un sénateur enlevé dans la région de Tébessa n'a dû son salut qu'au versement d'une importante rançon. A la fin de l'année 2005, un propriétaire d'un bar-restaurant à Tigzirt a été enlevé puis libéré quelques jours plus tard contre paiement de plus de 700 millions de centimes. En avril 2006, il y a eu l'enlèvement de l'un des frères Haddad, de l'entreprise ETRHB qui, lui aussi, a été libéré des mois plus tard après paiement d'une forte rançon. En août de la même année, un entrepreneur en travaux de bâtiment a été enlevé dans la commune d'Aït Yahia Moussa, à 28 km au sud-ouest de Tizi Ouzou. Le kidnapping qui a marqué le plus l'opinion publique reste celui du jeune Yacine Bouchelouh, enlevé en mai 2007 près de sa maison dans le quartier de Bordj El Kiffan, à l'est d'Alger, et retrouvé plusieurs semaines plus tard mort au fond d'un puits.