Le gouvernement reproche au mouvement associatif son inertie et menace de sévir. Selon le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Noureddine Yazid Zerhouni, il y a nécessité de réviser la loi sur les associations (la loi 90-31 du 4 décembre 1990) pour mettre de l'ordre dans le domaine. « Il est impératif de réviser les modalités d'accréditation des associations et définir leur champ d'intervention pour pouvoir atteindre les objectifs escomptés en la matière », affirme-t-il dans sa réponse à un sénateur lors d'une séance plénière consacrée aux questions orales. Une séance organisée jeudi dernier au Conseil de la nation. Affirmant que son département formulera, à cet effet, une proposition au gouvernement, le ministre n'a pas caché son mécontentement de l'action du mouvement associatif. « Une expérience de 15 ans d'activité associative a démontré qu'à l'exception de certaines associations, la majorité reste absente », déclare-t-il en précisant que la loi permet de procéder à la dissolution, par la voie de la justice, des associations ne respectant pas leurs engagements. Estimant que le pays a besoin d'associations crédibles qui s'engagent à travailler avec les communes et les wilayas en vue d'améliorer le quotidien des citoyens, le ministre accable celles activant actuellement sur le terrain et dont la faillite est avérée. Selon lui, 95% des associations agréées n'ont jamais présenté le rapport officiel sur leurs activités tel que prévu par la loi. « La majorité d'entre elles n'ont jamais présenté leur rapport financier », affirme-t-il. Les associations échappent donc à tout contrôle financier. Qui est habilité à faire respecter la loi si le ministère de l'Intérieur se contente d'un constat ? Ce n'est pas l'unique reproche. L'Etat qui a favorisé depuis des années la création des associations aux ordres et qui obéissent à la logique de l'allégeance constate, à ses dépens, l'inutilité de telles organisations qui n'ont aucune influence lors des événements sociaux, car elles n'ont aucune représentation sociale. Lors des événements de Chlef, de Berriane (Ghardaïa) et d'Oran, M. Zerhouni souligne à ce propos que le mouvement associatif était absent. Pourtant, explique-t-il, « Chlef compte 1721 associations, Ghardaïa en totalise 1867 et Oran compte 3348 ». Faisant son constat, Noureddine Yazid Zerhouni rejette « les accusations » selon lesquelles les autorités refusent d'agréer certaines associations. Pour lui, les demandes refusées sont, dans la majorité des cas, « celles dont les dossiers sont incomplets, non valides ou encore lorsque la raison avancée par le demandeur est incompatible avec le champ d'action de la société civile ». Pour étayer ses affirmations, le ministre donne le chiffre de 81 000 associations agréées actuellement. L'évolution du nombre d'associations, ajoute-t-il, « prouve que la réponse de l'administration aux flux de demandes d'agrément des associations est positive ». « Le nombre des associations a sensiblement augmenté depuis 2001, passant de 30 000 associations en 1992, à 58 000 en 2001, avant d'arriver à 75 000 en 2003 pour atteindre les 78 000 en 2005 », illustre-t-il. « Il n'y a pas de politique qui s'oppose aux activités à caractère associatif », dit-il en précisant qu'il y a des associations qui demandent des autorisations pour récupérer des dons envoyés par certains pays que l'on retrouve ensuite sur le marché. A qui incombe la responsabilité d'une telle faillite ? Selon les observateurs, la responsabilité de cette situation incombe entièrement au pouvoir politique. Voulant à tout prix légitimer son action, le pouvoir politique a souvent favorisé « la mise en place d'une société civile de circonstance ». Complètement inexistante au sein de la société, cette dernière, tout en bénéficiant des ressources financières, refait surface à l'orée des échéances électorales pour servir comme un mécanisme de légitimation du pouvoir. L'on se souvient qu'à l'occasion des élections présidentielles de 2004, le ministre de la Solidarité avait affirmé que « le mouvement associatif a récolté 500 000 signatures au profit du candidat Abdelaziz Bouteflika ». Au début de l'année en cours, « les associations dites de la société civile ont été également actionnées pour produire des motions de soutien pour un troisième mandat ».