Les prix de l'or noir sont soutenus surtout par la spéculation et la psychose permanente de pénurie dans laquelle se sont embourbés les acteurs du marché pétrolier, à commencer par les Etats consommateurs. « A moins d'une récession économique mondiale, le prix du pétrole restera élevé. Un renversement est toujours possible à court terme, mais un effondrement durable est à exclure. » C'est la conclusion d'une conférence si enrichissante, présentée jeudi dernier par Nordine Aït Laoussine, ancien ministre de l'Energie, animant la nouvelle version des Débats d'El Watan, consacrée au marché pétrolier mondial, ses enjeux et les défis auxquels sont confrontés les pays émergents, à l'instar de l'Algérie. Après une introduction de Omar Belhouchet, directeur de la publication d'El Watan, Nordine Aït Laoussine tient à préciser d'emblée que les cours actuels du pétrole viennent corriger un vieux slogan des pays consommateurs, selon lequel « un baril à 30 dollars paralyserait l'économie mondiale ». Une hypothèse complètement fausse, soutiendra l'invité d'El Watan. Une certitude pour le conférencier : « L'OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole) ne fixe plus les prix. Elle tente plutôt d'influencer les cours par le système des quotas. » D'après Nordine Aït Laoussine, consultant international, les spéculateurs ont carrément pris le contrôle du marché. D'autres facteurs exogènes interviennent aussi avec plus ou moins d'intensité, les marchés financiers et la valeur du billet vert sont également d'effets importants sur les cours de l'or noir, si l'on se réfère à l'exposé de Nordine Aït Laoussine. Pour ainsi dire, la spéculation sur le marché pétrolier constitue bel et bien le facteur déterminant des cours, alimenté à terme par une psychose permanente de pénurie. Il y a d'abord, à entendre l'animateur, « des doutes sur l'étendue réelle des réserves mondiales, sur le potentiel de l'Arabie Saoudite, mais aussi une incertitude sur l'évolution des capacités de production ». Viendront, ensuite, bousculer les donnes « les tensions géopolitiques qui affectent certains producteurs et la saturation des capacités disponibles tant en amont qu'en aval ». « Un marché bien approvisionné » C'est du moins ce que pense Nordine Aït Laoussine, l'un des membres fondateurs de Sonatrach, à propos des protestations incessantes de l'Agence internationale de l'Energie (AIE), appelant les membres de l'OPEP à augmenter la production. Mais en toile de fond, persuasion de l'heure, figure un accroissement qui paraît inéluctable des besoins des pays asiatiques, à commencer par l'Inde et la Chine. « Nous ne pouvons pas demander à des pays de ralentir leur croissance », répliqua l'orateur au sujet d'une question liée à une possible solution en mesure de limiter les effets négatifs de croissance sur l'environnement. Autour de la problématique de revoir à la hausse le taux de la production, l'AIE et l'OPEP se livrent depuis quelque temps une guéguerre froide qui n'a pas encore révélé tous ses secrets. Mais les cours de l'or noir semblent échapper au contrôle et aux influences des deux organisations, l'une défendait les intérêts des pays les plus industrialisés, tandis que l'autre luttait pour faire valoir les rentes des pays producteurs du pétrole. Selon l'AIE, l'OPEP devrait se préparer à produire 46 millions de barils par jour en 2015 et 60 mbj en 2030. La demande mondiale en 2006 a été évaluée par l'Agence internationale de l'Energie à 84,7 mbj, alors que l'OPEP produisait 38,8 mbj. La demande mondiale pourrait atteindre les 98,5 mbj en 2015 et 116,3 mbj en 2030. A entendre l'invité d'El Watan, « toute la question est de savoir si les pays de l'OPEP qui disposent de potentiels sont en mesure de répondre à la croissance de la demande ». La question s'impose avec acuité. Cependant, se référant aux prévisions exposées par l'ancien ministre de l'Energie, Nordine Aït Laoussine, la production non-OPEP devra atteindre vraisemblablement son pic vers le milieu de la prochaine décennie.