Cinéaste exigeant, habile à demeurer en marge et à poursuivre une œuvre solitaire incontestablement brillante, le cinéaste allemand, Wim Wenders, a présenté à Cannes son dernier film Palermo Shooting (titre français : Rendez-vous à Palerme). Cannes (France) : De notre envoyé spécial Une œuvre qui a suscité quelques remous de la part de ceux qui ont la fâcheuse tendance à ne voir rien de bon, quand ils restent en dehors, qu'ils ne comprennent rien au travail d'un réalisateur et à ce qui l'a poussé à se mettre à la tâche de filmer une histoire à laquelle il croit profondément. Wim Wenders a filmé un « road movie » comme il fait d'habitude, une aventure sicilienne à Palerme et à Gangi, une petite ville perchée à 1000 m d'altitude, sur la route de l'Etna, au sud-est de Palerme, dans les montagnes de Madonie. C'est un photographe allemand, atteint par un surcroît de célébrité et d'ennuis qui découlent sur sa vie personnelle, qui décide de tout lâcher et de partir en Sicile. Wim Wenders, qui recherchait une cité accueillante, aurait pu faire son film à Alger, où il a séjourné en 1984, l'année de Paris-Texas (on sait déjà l'histoire authentique de sa visite à Sidi Abderrahmane dans La Casbah et ses prières pour avoir la Palme d'Or : un vœu exaucé !). Mais il a tourné finalement à Palerme, parce qu'entre la Sicile et l'Allemagne, il y a une vieille histoire commune. Une histoire qui remonte à l'époque de l'empereur Frédéric II, qui a régné de 1212 à 1250 et qui se passionnait pour la Méditerranée. A Palerme, il avait découvert un mélange de peuples et de cultures qui l'enthousiasmait. Les Normands étaient très proches des Arabes-Siciliens. L'élite arabe occupait les très hauts postes intellectuels, politiques, scientifiques, diplomatiques. Arabes, Grecs, Espagnols, Normands, Français, Allemands ont tous laissé leur empreinte en Sicile. Aujourd'hui, les nouveaux émigrés viennent de Chine ! Des quartiers entiers de Palerme sont Chinois. C'est dans la Palerme d'aujourd'hui que Wenders fait rencontrer le photographe, joué par Campino, chanteur du groupe musical allemand Die Toten Hosen, et l'exquise actrice italienne, Giovanna Mezzogiorno, dans le rôle d'une artiste qui restaure les œuvres d'art abîmées, comme la grande fresque anonyme Il Trionfo della morte. La rock-star et l'artiste vont tomber amoureux et voyager à Gangi. Il y a un troisième personnage, joué par l'acteur américain, Dennis Hopper (présent déjà dans L'Ami américain de Wim Wenders, 1977). Dennis Hopper apparaît maquillé en blanc, le crâne totalement rasé. Il personnifie la mort dans des séquences assez hallucinantes. Palermo Shooting c'est aussi un film très rock. Il y a beaucoup de musique. Lou Reed, leader du groupe culte Velvet Underground, apparaît aussi dans son propre rôle de chanteur et guitariste. Palermo Shooting s'est révélé une œuvre très forte, très belle, très personnelle de Wim Wenders. C'est le dernier échantillon de cinéma d'auteur qu'on a vu au Festival de Cannes.