L'Algérie tourne le dos à son histoire. Elle a en effet décidé de créer des centres de rétention pour les immigrants clandestins en provenance de l'Afrique subsaharienne. Une décision extrêmement étonnante et surprenante d'un pays qui se voulait d'être le porte-parole de l'africanité. Elle fait d'autant plus mal que l'Algérie était très respectée en Afrique pour sa lutte de libération nationale. Elle était aussi respectée pour avoir été, après son indépendance, parmi les principaux soutiens des peuples africains en lutte contre le colonialisme et le racisme en Angola avec le MPLA, en Namibie avec le SWAPO, au Mozambique avec le FRELIMO, en Guinée-Bissau-Cap-Vert avec le PAIGC, en Afrique du Sud avec l'ANC. Son appui inconditionnel à ces mouvements lui a d'ailleurs valu d'être qualifiée de « Mecque des révolutionnaires » par le défunt Amilcar Cabral. En tant que chef de file du mouvement des pays non-alignés, notre pays était en pointe dans les forums internationaux pour la défense des peuples opprimés. Il était assez bien placé pour le faire d'autant que lui aussi a grandement souffert du colonialisme. Pire, durant la guerre, une bonne partie de la population a été parquée dans des camps d'internement. Et voilà que c'est ce pays qui crée aujourd'hui des centres qu'il appelle pudiquement de regroupement pour nos frères africains. Or, nos dirigeants clamaient haut et fort qu'ils ne seront jamais les sous-traitants de l'Europe et qu'ils ne feront pas la sale besogne à sa place. Ils répondaient à une démarche des Européens qui voulaient qu'on lutte à leur place contre l'immigration clandestine en créant des prisons pour des gens fuyant la misère et la faim et qui rêvent de trouver l'Eldorado de l'autre côté de la Méditerranée. Le Maroc et la Libye ont marché dans la combine, perdant ainsi leur âme et leur droit de se dire africains. Frantz Fanon doit se retourner dans sa tombe, lui qui a milité pour l'Algérie fraternelle, tolérante et phare du continent africain. Pourquoi les responsables algériens ont-ils fait voter cette loi scélérate ? Ont-ils subi des pressions occidentales ? Si oui, l'Algérie, qui a fait le 1er Novembre, contribué à la libération du continent, cette Algérie-là, nous la pleurerons parce qu'elle aura laissé la place à une république bananière. Elle a alors perdu son âme et son honneur. Déjà que plus personne n'écoute le pays sur la scène internationale et lui accorde peu de considération. La descente aux enfers continue.