« La situation est devenue intenable en Algérie et les autorités continuent malheureusement à cultiver l'archaïsme ». Ce constat des plus négatifs est établi par le premier secrétaire national du Front des forces socialistes (FFS) à l'ouverture jeudi des travaux de la conférence nationale des élus. Dans un style direct et n'ayant pas lésiné sur les mots, Karim Tabbou reproche à Noureddine Zerhouni, ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, d'avoir une approche « policière de la gestion du pays et de considérer l'Algérie comme étant un commissariat, et ce, au lieu d'apporter des solutions aux maux qui rongent cette société. L'horloge chez nos responsables s'est arrêtée en 1970 ! », a tonné M. Tabbou. S'adressant aux 661 élus, venus prendre part à cette manifestation organisée à Zéralda, à Alger, le porte-parole du FFS a dénoncé la poursuite des attentats, comme il a déploré la politique sécuritaire prônée par le gouvernement et qui a conduit au désastre. « Nos gouvernants ont fait de l'Algérie un pays malade, le plus malade du grand Maghreb, alors qu'il recèle un potentiel humain des plus importants », a indiqué M. Tabbou, qui estime que les Algériens ont le droit d'avoir l'espoir de vivre. Pour M. Tabbou, cette rencontre est une occasion pour exiger une claire répartition des compétences et des prérogatives entre le pouvoir central et local et de demander des moyens correspondants pour un réel exercice et une certaine autonomie du pouvoir au niveau local. « Les élus locaux, avec la collaboration de l'administration locale, doivent pouvoir disposer d'une capacité réelle d'intervention en ce qui concerne le développement local, en général, notamment la gestion du foncier et le contrôle de l'urbanisme », a-t-il estimé. Il s'agit, selon le premier secrétaire national du FFS, de libérer les communes et de lever les obstacles qui empêchent l'élu d'être un élu à part entière. L'élu, a martelé le conférencier, peut être un bon gestionnaire, un bon technicien, mais il doit être avant tout un homme politique conscient. M. Tabbou a appelé les élus locaux du parti à orienter leurs efforts en direction de la jeunesse qui se trouve depuis quelques années dans une détresse totale. Mettant l'accent sur les enfants de cette Algérie qui ont connu un traumatisme inégalé, en l'occurrence le terrorisme, M. Tabbou soutient que cette frange a besoin de reprendre espoir dans la vie. M. Tabbou a fait remarquer qu'il était temps d'évaluer ce qui a été fait pour concrétiser les possibilités de débat et de participation de la population à la gestion des collectivités. Dans ce sillage, il a soutenu que la conférence des élus sera « l'occasion de mieux cerner, à travers l'expérience acquise sur le terrain, les conditions politiques et administratives requises pour assurer la pleine représentativité des élus et leurs responsabilités devant les citoyens et l'Etat », a-t-il dit. Par ailleurs, le porte-parole du FFS a rappelé les positions politiques de son parti concernant les libertés et la démocratie, soulignant que le « seul chemin » pour la mise en place d'un « véritable processus de démocratisation » demeure celui de la sécurité nationale, de la stabilité et de l'espoir. « Réhabiliter et civiliser le politique, tant au niveau central que local, est le seul moyen d'impliquer toutes les composantes de la société dans le développement du processus démocratique », a-t-il estimé. Invité à cette conférence, Mohand Amokrane Cherifi, expert auprès des organisations internationales, a expliqué le rôle des municipalités dans la lutte contre la pauvreté tout en évoquant les questions économiques et sociales qui préoccupent les Algériens. Pour lui, il ne peut y avoir de développement sans deux facteurs vitaux, à savoir la justice et un Etat de droit. Sur le chapitre portant sur l'union pour la Méditerranée, le conférencier pense qu'il s'agit là de l'union des Etats qui malheureusement exclut le peuple et dont l'Algérie ne tire nullement profit, citant dans ce sens l'exemple du processus de Barcelone. Pour ce qui est du dossier de l'énergie nucléaire, M. Cherifi a souligné que « l'Algérie n'a pas la technologie nucléaire et restera donc dépendante. Notre pays doit plutôt développer l'énergie solaire ». Sur le plan économique, M. Chérifi plaide pour l'importation des vaches à la place du lait, qui revient à l'Etat à trois millions de dollars, et l'encouragement de la production locale.