Les travaux du forum pour l'avenir du Grand Moyen-Orient et l'Afrique du Nord (GMO), abrités par la ville marocaine de Rabat, se sont achevés hier avec la proposition du Bahreïn d'accueillir le prochain rendez-vous du GMO prévu en 2005. Bien que considérée comme une prise de contact, la première édition du forum pour l'avenir du GMO a tout de même adopté quelques résolutions. Des résolutions qui éloignent, pour le moment, l'idée que les réformes démocratiques « souhaitées » par les Etats-Unis dans le monde arabe ne seront pas imposées. A la fin des travaux du forum, les participants ont adopté, en effet, une résolution permettant à chaque pays d'avancer dans les réformes politiques et économiques selon leur situation spécifique. « Les réformes doivent être entreprises dans le cadre de la souveraineté de chaque Etat et aussi dans le cadre du respect des droits de l'homme, de la charte des Nations unies et du respect des libertés politiques », ont déclaré les pays participants comme pour exprimer le rejet de toute forme d'ingérence. Le secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa, a également usé de son influence pour permettre aux travaux de répondre aux préoccupations des pays arabes. Pour y parvenir, il stigmatisera, de manière très diplomatique, la propension des Etats-Unis à se poser en donneurs de leçons, alors que leur politique au Proche-Orient est loin d'être équilibrée. S'exprimant au nom de la Ligue arabe, il s'est déclaré, à l'ouverture des travaux, en faveur d'un partenariat entre le Moyen-Orient et les pays du G8, en prenant soin toutefois de souligner que cela n'est envisageable que si les partenaires sont sur un pied d'égalité. « Comment ce partenariat pourra-t-il réussir, alors que l'une des parties est accusée de terrorisme ? », s'est interrogé l'orateur, tout en appelant les participants au forum à « retirer les accusations adressées à l'Islam comme religion et culture ». La position de Amr Moussa est, rappelle-t-on, partagée par l'opinion arabe qui reste très méfiante à l'égard de l'initiative du GMO parrainée par Washington. LA QUESTION PALESTINIENNE Autre fait à signaler : les réserves arabes sont aussi partagées par l'Europe qui estime essentiel, pour le succès de l'initiative, le règlement de la question palestinienne sur des bases justes et équitables. Cela d'ailleurs a été un supplément de frictions entre l'Europe et les Etats-Unis. Dans cet ordre d'idées, le chef de la diplomatie française, Michel Barnier, a exprimé les réserves de son pays sur l'idée d'une institutionnalisation du forum en question et d'une institutionnalisation de l'initiative. « Les mécanismes de coopération existants sont très efficaces », a indiqué à ce propos le ministre français à l'ouverture des travaux. De son côté, Colin Powell, qui a coprésidé la séance de travail avec son homologue marocain Mohamed Benaïssa, s'est félicité de la tenue de ce forum et l'a qualifié d'« historique ». Saluant les efforts déjà accomplis par les pays arabes, il a répondu aux appréhensions ambiantes en invitant, notamment, les participants à ne pas se « se quereller inutilement sur le rythme des réformes démocratiques ou sur la question de savoir si les réformes économiques doivent précéder les réformes politiques » et en mettant en exergue le combat commun contre la menace du terrorisme. Côté travaux, les ministres des Affaires étrangères et des Finances d'une vingtaine de pays du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord et leurs homologues du G8, réunis dans l'enceinte du ministère marocain des Affaires étrangères, ont approuvé un document qui souligne l'importance des « défis communs » auxquels ils sont confrontés et leur besoin d'y répondre globalement par le dialogue et la coopération. Les participants au rendez-vous de Rabat se sont engagés, en outre, à renforcer les bases de la démocratie et de la concertation dans la région ainsi que l'élargissement du cadre de la participation dans la vie politique et dans les affaires générales. De plus, les pays représentés au forum se sont prononcés pour l'égalité entre les citoyens et l'adoption d'un système de justice indépendant. Néanmoins, ils ont mis l'accent sur le fait que le développement politique est un long processus et une revendication qui ne peut être menée et concrétisée sur le terrain que par les pays concernés.