Mohammed VI est satisfait : Bush lui offre l'opportunité de sortir de l'isolement international dans lequel l'a plongé son intransigeance sur la question du Sahara occidental. Washington organise le 11 décembre, au Maroc, le Forum de l'avenir du Grand Moyen-Orient, première rencontre organisée dans le cadre de l'initiative américaine controversée sur le remodelage de cet immense ensemble qui court du Maroc au Pakistan. Le projet Grand Moyen-Orient, élaboré par les sherpas de Bush dans le sillage de l'occupation irakienne au motif qu'il faille coûte que coûte mettre les pays arabo-musulmans sous les standards démocratiques universels, a été revu en ce qui concerne les formes de son application avant d'être adoubé par le dernier sommet du G8 aux Etats-Unis. Ce projet, visant à promouvoir des réformes politiques et économiques au Moyen-Orient et au Maghreb, a suscité des réserves dans le monde arabe, y compris au Maroc. La plupart des dirigeants de cet ensemble revendiquant l'exception culturelle et la liberté de développer eux-mêmes la démocratie. Le forum doit réunir les ministres des Affaires étrangères et des Finances de plus de vingt pays du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord, aux côtés de ceux du G8 (Etats-Unis, France, Royaume-uni, Allemagne, Italie, Japon, Canada et Russie), ainsi que des responsables d'organisations internationales. La liste exacte des pays invités n'a pas été publiée et l'on ignore, et la ville qui abritera la rencontre n'a pas non plus été précisée. Il s'agirait, soit de Rabat, soit de Marrakech. Cette réunion, selon les autorités marocaines, doit notamment examiner les moyens pour consolider l'engagement des pays du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord en faveur du codéveloppement fructueux et le renforcement harmonieux des processus de réformes politiques, économiques et sociales. Le Forum de l'avenir, qui se veut une rencontre inaugurale pour un partenariat franc, constructif, basé sur la coresponsabilité entre les pays de la région et du G8, est ainsi l'occasion pour le roi Mohammed VI de se remettre en selle sur la scène internationale où il a été sérieusement malmené au sujet de l'affaire du Sahara occidental, la communauté internationale exigeant de lui l'application de la légalité internationale. Le souverain marocain s'est même vu pris en faute par son ancien ministre de l'Intérieur, Basri, un fidèle de Hassan II, qui a admis que seul un référendum pouvait régler la question du Sahara occidental. La tenue du forum au Maroc a été critiquée par deux formations politiques marocaines, le Parti du progrès et du socialisme (PPS, coalition gouvernementale) et le Parti islamiste de la justice et du développement (PJD, opposition), pour lesquels : il faut que les Américains le sachent, une démocratie ne s'impose pas, encore moins quand elle est apportée dans les fourgons d'une armée d'occupation. Les Etats-Unis, pour leur part, se sont félicités de la tenue de ce forum. D. B