Selon l'OMS, un médicament sur dix serait un faux, c'est-à-dire un produit ne contenant aucun principe actif ou sous-dosé, voire contenant des substances toxiques. Afin de lutter contre ce fléau, l'organisation des Nations unies a décidé de composer un groupe de spécialistes de la lutte anti-corruption et d'experts des médicaments provenant d'organisations internationales et de différents pays pour promouvoir une plus grande transparence, sachant que le marché des produits pharmaceutiques a atteint la somme de 50 milliards de dollars par an et, de ce fait, est « très exposé à la corruption ». Selon l'OMS, avant de parvenir aux personnes qui en ont le plus besoin, les médicaments passent par plusieurs intermédiaires, et près de 25% seraient perdus dans la chaîne de production et de distribution : donc les complexités de ces circuits peuvent favoriser les corruptions de toutes sortes. Rappelons qu'en avril 1999, 771 cas de médicaments de qualité inférieure avaient été répertoriés dans la base de données de l'OMS sur les contrefaçons, dont 77% concernaient des pays en développement. L'analyse des données a montré que dans 60% des 325 cas, un principe actif faisait défaut. Il ressort d'une récente étude, parue dans The Lancet, que jusqu'à 40% des produits supposés contenir de l'artésunate (le meilleur médicament disponible aujourd'hui contre le paludisme chimiorésistant) ne contenaient pas en fait de principe actif, et n'avaient aucun effet thérapeutique. En 2002, GlaxoSmithKline a découvert aux Etats-Unis des flacons suspects supposés contenir 60 comprimés de Combivir (lamivudine plus zidovudine) qui contenaient en fait un autre médicament, le Ziagen (abacavir). La société a pu déterminer que des étiquettes contrefaites de comprimés de Combivir ont été placées sur deux flacons de Ziagen, les étiquettes sur deux autres flacons étant suspectes. Les deux médicaments sont utilisés dans le cadre d'associations médicamenteuses contre l'infection au VIH et peuvent provoquer des réactions d'hypersensibilité potentiellement mortelles chez des patients qui prennent d'autres médicaments. De nombreuses infractions similaires ont été découvertes à travers le monde et des boîtes de médicaments contrefaits ont été vendus dans des pharmacies en Angleterre et en en Allemagne. Au cours de l'épidémie de méningite au Niger en 1995, plus de 50 000 personnes ont reçu des faux vaccins provenant d'un don d'un autre pays qui les croyait sûrs. Cette contrefaçon a été à l'origine de 2500 décès. La consommation de sirop contre la toux, contenant du paracétamol préparé avec du diéthylène glycol (un produit chimique toxique utilisé comme antigel), a provoqué 89 décès en Haïti en 1995 et 30 décès de nourrissons en Inde en 1998. Sur le million de décès annuels par paludisme, 200 000 pourraient être évités si les médicaments disponibles étaient efficaces, de bonne qualité et correctement utilisés. Une étude, effectuée en Asie du Sud-Est en 2001, a révélé que 38% des 104 antipaludéens en vente en pharmacie ne contenaient aucun principe actif et avaient provoqué des décès évitables.