Investissement. C'est le maître mot du séminaire portant sur le nouveau partenariat économique franco-algérien qui s'est tenu hier à Paris à l'initiative de UBIFRANCE, l'agence française pour le développement international des entreprises, et la mission économique française en Algérie. Investir est aujourd'hui essentiel, tant pour l'économie algérienne que pour les entreprises françaises elles-mêmes. Les principaux intervenants qu'ils soient algériens, à commencer par le ministre des Finances lui-même, ou français ont souligné, textes de lois à l'appui, que le moment et l'environnement sont propices à des investissements français en Algérie et qu'il était temps de passer des relations proprement commerciales à des activités économiques locales. « Le commerce n'est pas inconciliable avec l'industrie et l'activité économique », a souligné Abdelatif Benachenhou. « Il y a des possibilités en Algérie », a-t-il ajouté. Puis « je suis frappé que des efforts soient faits pour localiser des activités au Maroc ou en Tunisie, ou en Afrique du Sud, mais pas suffisamment en Algérie. L'Algérie est un choix raisonnable. Tout le monde doit y réfléchir, je pense à la France, à l'Espagne, à l'Italie. La réflexion devrait aller vers plus de décision. » L'orateur a également souligné que, dans les prochaines années, l'Algérie n'aura pas besoin de ressources financières, mais d'expertise. « Le manque de l'Algérie, ce n'est pas la volonté, mais la capacité de faire. Tout le monde gagnera à la modernisation de l'économie algérienne. » Faisant référence à l'aide-mémoire qu'il a signé en juillet dernier avec Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Economie et des Finances, Abdelatif Benachenhou a précisé : « Dans l'aide-mémoire, j'ai souhaité qu'il y ait un équilibre entre les exportations et les investissements français. Chacun doit défendre ses intérêts mais chacun doit être attentif à l'autre. » Les Algériens attendent du partenariat avec la France qu'il soit « fondé sur une meilleure connaissance des impératifs du développement de l'Algérie. Nous sommes si proches qu'on finit par ne pas savoir ce qu'est l'autre. C'est l'aveuglement de la proximité », a encore dit le ministre des Finances algérien. L'ambassadeur d'Algérie, Mohamed Ghoualmi, a fait valoir qu'on ne peut exclure la relation algéro-française de son environnement euroméditerranéen et de relever le niveau d'investissement très faible par rapport à la situation florissante de l'activité commerciale. « L'explication est-elle politique ? économique ? ou culturelle ? », s'est-il demandé. « A l'exception de l'année 1976 (sous l'impulsion de Claude Cheysson, des accords d'association ont été signés par les pays du Maghreb avec l'UE, ndlr), l'attitude de l'Europe vis-à-vis du Maghreb a été, ces 40 dernières années, une attitude de méfiance et d'inquiétude. Nous ne pouvions construire un partenariat stratégique sans réfléchir aux conséquences des politiques du passé », a ajouté l'ambassadeur algérien. « Les Européens de la Méditerranée doivent peut-être réfléchir à plus de dynamisme, réfléchir à un partenariat qui soit à mi-chemin de l'intégration et de l'association entre l'Europe et le Maghreb », a-t-il suggéré. « On peut investir en Algérie, il y a une sécurité de l'investissement. Le cadre juridique évolue en faveur d'un meilleur environnement des affaires, s'adapte et est perfectible. Il est plus lisible », ont indiqué les avocats Samir Hamouda et Hind Benmiloud. Et de dire qu'en matière d'investissement, l'entreprise étrangère bénéficie des mêmes droits et possibilités qu'une entreprise nationale, de la protection du traité bilatéral franco-algérien et de l'ensemble des conventions internationales signées par l'Algérie. En cas de litige, l'investisseur étranger peut saisir la juridiction qu'il veut : algérienne, française ou internationale. Dans le cadre de l'« aide-mémoire sur le partenariat par la croissance et le développement », destiné à dynamiser les échanges bilatéraux, la France a dégagé une enveloppe de 2 milliards d'euros 750 millions d'euros de crédits concessionnels, un milliard d'euros de crédits commerciaux garantis et 288 millions d'euros de conversion des dettes en investissement a précisé René André, président d'UBIFRANCE. Il a laissé entendre que ces 288 millions d'euros pourront être utilisés pour « des investissements dans de nombreux secteurs en expansion ». Il a ajouté que pour promouvoir l'investissement français en Algérie, 75 millions d'euros, sous forme de prêts bonifiés, ont été octroyés par l'Agence française de développement afin de faciliter l'investissement des PME algériennes. Pour dynamiser la participation des entreprises françaises aux projets d'infrastructures en Algérie, la France a ouvert une enveloppe supplémentaire de un milliard d'euros de garanties de crédits par la Coface destinés à couvrir des futurs contrats dans les secteurs des transports, des télécommunications, de l'électricité, des hydrocarbures, des biens d'équipements industriels, des services urbains et de l'habitat. Le président d'UBIFRANCE a, enfin, indiqué qu'une coopération dans le secteur bancaire est mise en œuvre visant à moderniser le secteur bancaire algérien et à promouvoir un partenariat multiforme entre les banques des deux pays, accompagné d'un programme de formation. Une nouvelle tranche de 61 millions d'euros de dette sera négociée en investissements au cours du 1er trimestre 2005, a déclaré Pierre Mourlevat, chef de la Mission économique d'Alger.