Après les inondations, le séisme, le terrorisme, les épidémies, les émeutes et bien d'autres malheurs, les Algériens ont cru avoir tout vu, tout connu et subi, mais voila que survient un autre phénomène qui vient s'ajouter à la liste et avec lequel se débat l'Algérie jusqu'à présent. Notre pays, à l'instar des autres pays du Maghreb et du Sahel, fait face depuis fin 2003, à l'une des plus graves invasions acridiennes depuis 15 ans. D'ores et déjà, la lutte contre cet insecte, qui dévaste toute végétation sur son passage, a coûté la bagatelle de 15 milliards de dinars, selon les dernières estimations du ministre de l'Agriculture et du Développement rural, Saïd Barkat. L'ampleur de l'invasion est telle que certains responsables n'ont pas hésité à parler de guerre et de bataille qu'il faut impérativement gagner, car il y va de notre économie agricole. L'été dernier, les essaims de criquets ont failli atteindre les villes côtières algériennes. Pour cette fin d'année, une régression a été constatée mais le péril acridien demeure présent et les spécialistes prévoient et redoutent la phase printanière à partir de février 2005 où l'on s'attend à un véritable déferlement en provenance du nord de la Mauritanie et du Sahara-Occidental. L'histoire retiendra que la communauté internationale est longtemps restée indifférente aux cris de détresse des pays affectés, notamment ceux du Sahel où une véritable catastrophe humanitaire se profilait. Devant la réaction tardive des bailleurs de fonds et des pays donateurs, seule la solidarité entre pays africains a prévalu. A un moment donné, la situation dans les pays du Sahel, notamment le Mali et la Mauritanie, était telle qu'une répétition du scénario catastrophe de l'invasion acridienne de 1987-1989 où 600 millions de dollars et 5 ans de lutte ont été nécessaires planait sur la conjoncture de l'époque. Selon les experts, cette invasion durera environ trois ans. Si la lutte antiacridienne n'est pas menée à bien, les répercussions sur la région déjà pauvre située dans un continent où près de 200 millions de personnes souffrent de malnutrition seront désastreuses. En sus des dispositifs conjoncturels mis en place pour faire face à l'invasion acridienne qualifiée par le chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia de « grave catastrophe naturelle » lors de son intervention le 27 juillet dernier à l'occasion de la réunion ministérielle des pays touchés par ce fléau, les experts réfléchissent sérieusement à élaborer une stratégie afin de casser le cycle biologique de reproduction du criquet pèlerin durant une longue période pour protéger les territoires du Maghreb et de l'Afrique de l'Ouest.