[image] De nombreux coptes se sont mobilisés samedi en faveur du candidat à la présidentielle égyptienne Ahmad Chafiq, voyant dans l'ancien Premier ministre de Hosni Moubarak un rempart face à "l'islamisme rampant". "Nous donnons notre voix à celui qui est en mesure d'assurer la sécurité de notre communauté et celle du pays", affirme Makram, un copte (chrétien d'Egypte), qui proclame ouvertement ses sympathies pour M. Chafiq. "Depuis la fin du 1er tour, le 24 mai, nous avons lancé une campagne de mobilisation au sein de la communauté pour voter Chafiq et encourager les récalcitrants à venir voter ce samedi et dimanche", ajoute Makram, 30 ans. Mais il dément qu'une consigne de vote ait été donnée par la hiérarchie de l'église copte orthodoxe d'Egypte. A Chobra, quartier populaire du Caire où vivent de nombreux chrétiens, l'appel a été entendu et de longues files se sont formées tôt le matin devant les dizaines de bureaux de vote, essentiellement des écoles et lycées, où femmes et hommes votent séparément. Les détracteurs de M. Chafiq le considèrent comme un "fouloul", un terme péjoratif désignant les membres du régime déchu de Hosni Moubarak, renversé par une révolte populaire en février 2011. Mais Makram répond que ce candidat "a une vision claire pour l'avenir du pays" et une expérience "qui lui permet de rétablir la sécurité et protéger les discriminés". Il faisait référence aux chrétiens qui représentent 6 à 10% des plus de 80 millions d'Egyptiens, et qui sont nombreux a dénoncer une "islamisation rampante" de la société. Nombreux sont les coptes de Chobra qui disent ne pas croire aux promesses du candidat des Frères musulmans, Mohammed Morsi, arrivé en tête au premier tour avec 24,7% des suffrages, contre 23,6% à M. Chafiq. "Ils disent quelque chose et font le contraire pour nous marginaliser davantage. Regardez, depuis deux ans nous sommes la cible d'attentats, de meurtres, les restrictions pour la construction d'églises se sont multipliées et Dieu sait quel avenir nous réservent les salafistes", s'inquiète Maurren. Cette institutrice copte de 35 ans, qui se targue d'avoir fait campagne depuis le premier tour pour M. Chafiq, explique que sa communauté "s'inquiète 'une islamisation rampante du pays favorisée depuis la révolte de l'an dernier par des fonds occultes en provenance du Qatar et de l'Arabie saoudite". "Aujourd'hui, les Frères musulmans s'opposent à ce qu'un chrétien ou une femme se présente à la présidence de la République. Demain s'ils sont au pouvoir ils vont nous demander de faire nos valises", assure-t-elle. A l'Ecole Mohammed Abdou de Chobra, Omar Abdi, un commerçant musulman du quartier s'insurge contre les critiques à l'encontre des islamistes et appelle ses compatriotes coptes à se départir de leur obsession sécuritaire. "Nous avons tous été discriminés sous les anciens régimes. Maintenant il y a une nouvelle ère et toutes les composantes de la société doivent oeuvrer pour construire la nouvelle Egypte", dit cet homme de 50 ans portant la barbe. "Votez Morsi. Il n'y a aucune crainte", déclare-t-il, s'attirant des gestes de sympathies parmi l'assistance, qui clame "Que Dieu protège l'Egypte". M. Morsi lui-même a, dans un discours, cherché à rassurer "nos frères chrétiens" qui "sont des partenaires nationaux et ont des droits complets". Sur certaines de ses affiches il fait figurer un pape copte. M. Chafiq, de confession musulmane, se présente quant à lui comme un adversaire résolu des islamistes, qu'il accuse "d'obscurantisme" et de vouloir ramener l'Egypte "au Moyen-Age". Peu présents dans les cercles du pouvoir, les Coptes ont perdu en mars leur patriarche, Chenouda III, ardent défenseur de sa communauté, décédé à l'âge de 88 ans et toujours pas remplacé.