L'Union européenne a mis sur les rails lundi sa mission au Mali qui vise à former, entraîner et réorganiser l'armée nationale au cours de l'année 2013 afin de l'aider à reconquérir le nord occupé par des groupes islamistes armés. Après plusieurs mois de discussions, cette mission militaire fait désormais consensus au sein des 27 pays de l'UE, dont les ministres des Affaires étrangères ont approuvé lundi à Bruxelles le "concept de gestion de crise". Cette étape marque le lancement de la planification opérationnelle de la mission qui devrait entraîner le déploiement de 400 militaires européens, dont 250 formateurs, à partir du premier trimestre 2013. L'objectif est de "rétablir les capacités militaires des forces armées maliennes afin qu'elles soient en mesure de mener des opérations de combat visant à restaurer l'intégrité territoriale du pays". L'UE y a intérêt car "la présence de groupes terroristes et l'oppression des populations locales dans le nord du Mali (...) ne représentent pas seulement une lourde menace pour la région du Sahel mais aussi pour l'Afrique du Nord et l'Europe", a déclaré Catherine Ashton, la chef de la diplomatie européenne. Sa concrétisation contraste avec le flou qui persiste sur les tenants et les aboutissants du projet d'intervention d'une force de 3.300 soldats africains dans le nord du Mali. "En l'état actuel des choses, la mission européenne, même si elle est relativement modeste, est la seule initiative prête à être lancée dans le dossier malien", souligne un diplomate. Elle consiste à former quatre bataillons de 650 soldats chacun, soit 2.600 hommes, dans un centre d'entraînement situé près de la ville de Ségou, à 250 km au nord de Bamako. Les Européens vont également conseiller les autorités pour l'amélioration des structures de commandement. "Il s'agit d'aider l'armée à se reconstruire opérationnellement et moralement, de lui redonner la capacité à changer le rapport de force avec les groupes armés qui contrôlent le nord", indique un expert européen. Actuellement, ces derniers "ne considèrent pas l'armée malienne comme une menace crédible". Les forces maliennes ont été totalement désorganisées par le coup d'Etat qui a renversé le président Amadou Toumani le 22 mars, et par l'offensive des groupes islamistes qui contrôlent les régions administratives de Goa, Tombouctou et Kidal dans le nord. "Les profondes fractures apparues au sein de l'armée ont généré des tensions qui devront être gérées avec tact par des formateurs européens compétents et au fait de la situation politique", souligne l'expert Damien Helly, dans une étude de l'Institut européen d'étude sur la sécurité (ISS). L'ambition de la mission est de rendre les bataillons opérationnels en quelques mois, alors que l'opération de reconquête du nord pourrait être lancée en septembre-octobre 2013, à la fin de la saison des pluies. Pour cela, les formateurs chercheront à renforcer les capacités techniques de l'armée, qui sera notamment confrontée au casse-tête du franchissement du large fleuve Niger. Ils mettront aussi l'accent sur le respect des droits de l'Homme, afin de "tenter de canaliser le désir de revanche de certains soldats", explique un expert, en citant le risque de "pillages et d'exécutions sommaires". Une dizaine de pays de l'UE, au premier rang desquels la France, l'Espagne et l'Allemagne, ont donné leur accord pour déployer des formateurs, dont la sécurité sera assurée par 150 militaires. Le budget de la mission EUTM Mali a été évalué entre 4 et 7 millions d'euros, les coûts liés aux militaires dépêchés étant à la charge des Etats qui les envoient.