Le président français François Hollande entame mercredi une visite d'Etat au Maroc censée conforter les bonnes relations entre les deux pays mais qui risque d'être ternie par le scandale de la mise en examen de l'ex-ministre du Budget, Jérôme Cahuzac, pour blanchiment de fraude fiscale. Les aveux de cet ancien pilier du gouvernement de Jean-Marc Ayrault, qui a reconnu mardi détenir depuis une vingtaine d'années un compte à l'étranger, ont provoqué un énorme choc dans l'ensemble de la classe politique à Paris, éclaboussant l'exécutif. M. Hollande a lui-même condamné mardi "une impardonnable faute morale". Mercredi en fin de matinée, il devait dans la précipitation faire "une déclaration télévisée" préenregistrée diffusée juste après le conseil des ministres et avant son départ dans la foulée pour Casablanca. Le président de la République espère ainsi éviter que l'affaire Cahuzac ne pollue complètement les deux jours de sa visite d'Etat au Maroc, où il devait atterrir à 12h30 locale, 14h30 heure de Paris (12H30 GMT). Mais au moment même où il entamera ses entretiens avec le roi Mohammed VI, se tiendra à Paris, à l'Assemblée nationale, la séance des questions au gouvernement où l'opposition, voire une partie de la gauche, devraient de nouveau monter au créneau pour réclamer des comptes au président de la République. Pour l'heure, le programme de la visite de deux jours de M. Hollande, suivie par un grand nombre de journalistes, reste inchangé de même que sa philosophie: la France entend conforter "une relation de haut niveau" avec son premier partenaire au Maghreb, resté stable dans la tourmente des Printemps arabes. Le Royaume chérifien avait peu apprécié que le nouveau président français réserve, il y trois mois, son premier déplacement en Afrique du Nord à son rival algérien. Mais depuis, la page est tournée et les relations franco-marocaines restent "denses et fluides", assure Paris soulignant que Mohammed VI a été le premier chef d'Etat reçu par François Hollande à l'Elysée, le 24 mai 2012. La première journée de M. Hollande, qui devrait être accompagné de huit ou neuf ministres et de quelque soixante patrons français, sera marquée par la signature d'une trentaine d'accords et de contrats, en particulier dans le domaine des transports (ferroviaire, tramway, métro, ligne à grande vitesse), de l'agroalimentaire, du traitement de l'eau, et des énergies renouvelables. Il doit inaugurer une station d'épuration des eaux, dans le grand Casablanca, projet mené par la Lydec (Lyonnaise des eaux de Casablanca, filiale de GDF-Suez). Devant des chefs d'entreprises français et marocains, M. Hollande compte aussi développer l'idée de "colocalisation", sorte de partenariat entre entreprises françaises et marocaines censé générer des emplois dans les deux pays. Quelque 750 entreprises françaises, dont 36 des 40 entreprises du CAC 40, sont présentes au Maroc, selon les chiffres de l'Elysée. Jeudi, après une visite de la grande mosquée Hassan II de Casablanca, il se rendra à Rabat pour des entretiens avec le Premier ministre Abdelilah Benkirane, et un discours très attendu devant le Parlement marocain. "Il utilisera cette tribune pour s'exprimer sur les grands sujets de l'heure" : Syrie, Mali, Printemps arabes, processus de paix au Proche-Orient, a indiqué son entourage. Le président français devrait en particulier souligner que "le Maroc a trouvé sa voie, va dans le bon sens, dans un contexte où les Printemps arabes offrent beaucoup de potentiels mais aussi des risques", a indiqué un diplomate français. Il devrait également saluer "les positions très nettes" du roi Mohammed VI en faveur de l'intervention française au Mali, lors du sommet islamique du Caire, en février. Concernant le Sahara occidental, une ex-colonie espagnole que Rabat contrôle mais qui est revendiquée par les indépendantistes du Front Polisario, la position de la France reste la même: Paris soutient le plan d'autonomie marocain comme "base sérieuse et crédible" de discussion et souhaite une "solution négociée dans le cadre de l'ONU". Le Front Polisario a pour sa part appelé mardi la France à "réviser sa position".