L'Algérie et le Maroc, les deux poids-lourds du Maghreb, viennent de se livrer à une nouvelle joute verbale, preuve de leur incapacité à surmonter leurs différends, en particulier autour de la question du Sahara occidental, en dépit des conséquences économiques. La rivalité entre Alger et Rabat, ancienne, a été réactivée ces dernières semaines par les incertitudes politiques prévalant dans les deux pays, selon des analystes: maladie du président algérien Abdelaziz Bouteflika et crise gouvernementale au Maroc. Après plusieurs mois d'accalmie, le ton est remonté fin juin autour du débat sur la réouverture des 1.600 km de frontières communes, fermées depuis 1994 à la suite d'un attentat meurtrier à Marrakech, dont le Maroc avait rendu responsable les services de renseignement algériens. Face aux trois "conditions" posées par l'Algérie --portant sur le Sahara mais aussi le trafic de drogue-- Rabat a vu rouge. Il s'agit d'une "pratique d'un autre âge" qui "dénote une culture politique d'une ère révolue, en total déphasage avec les exigences et les perspectives du XXIe siècle", a asséné le ministre des Affaires étrangères. Le porte-parole de la diplomatie algérienne, Amar Belani, a aussitôt dénoncé "une escalade préméditée", dans le cadre d'une campagne médiatique anti-algérienne, selon lui. Cinquante ans après "la guerre des sables", la principale pomme de discorde entre les frères ennemis reste indiscutablement le Sahara occidental, une ex-colonie espagnole contrôlée par le Maroc. Si l'Algérie affirme ne pas être partie prenante dans ce conflit, elle soutient les indépendantistes sahraouis du Front Polisario. A ce titre, le précédent échange acerbe, à l'automne dernier, avait porté sur un discours du roi Mohammed VI imputant l'absence d'avancées à un manque de "volonté sincère" de la part des "autres parties". Le Maroc a "torpillé le processus de normalisation des relations entre nos deux pays", avait répliqué un haut responsable algérien. Une détente notable avait par la suite prévalu, le ministre marocain de l'Intérieur Mohand Laenser affirmant même la volonté commune d'un renforcement de la coopération, lors d'un déplacement à Alger.