KABOUL - Le bombardement aérien qui a tué vendredi jusqu'à 90 personnes, dont des civils, en Afghanistan survient au pire moment pour les forces internationales, qui venaient d'annoncer une nouvelle stratégie visant notamment à mieux protéger les civils et à gagner leur sympathie. Les pertes civiles dues aux opérations des forces étrangères contre les insurgés afghans sont une source permanente de tensions entre le gouvernement afghan et ses soutiens occidentaux, mais surtout de colère populaire. L'Otan a effectué une frappe aérienne vendredi contre des talibans qui avaient, selon elle, détourné deux camions-citernes dans la province de Kunduz dans le nord. Selon l'Otan, un camion a calé en traversant une rivière et les insurgés ont alors appelé des villageois à se servir en essence. D'après des témoins, le bombardement s'est produit au moment où des civils siphonnaient le carburant, tuant des dizaines de personnes et en blessant horriblement de nombreuses autres. Les autorités estiment qu'entre 55 et 90 personnes ont péri, des insurgés et des civils, mais ne pouvaient fournir de bilan précis. L'Otan, l'ONU et Kaboul ont promis d'enquêter, tandis que les Etats-Unis se disaient "très préoccupés" par d'éventuelles pertes civiles. Cette bavure n'aurait pu survenir à un pire moment pour les puissances occidentales, qui tentent de justifier leur présence en Afghanistan au moment où leurs opinions sont de plus en plus opposées à la guerre, considère un spécialiste étranger à Kaboul. "D'un autre côté, le timing est parfait pour montrer quelles difficultés les troupes étrangères doivent affronter", ajoute-t-il sous couvert d'anonymat. Le président afghan Hamid Karzaï a déclaré vendredi que "viser des civils" est "inacceptable". Les critiques estiment qu'il utilise le thème des victimes civiles des opérations étrangères pour doper sa popularité en berne. Selon l'ONU, sur les six premiers mois de 2009, plus de 1.000 civils ont péri, parmi lesquels un tiers ont été tués par les forces favorables au gouvernement, essentiellement dans les bombardements aériens des troupes internationales.