Anarchie, violation de la réglementation, mépris envers les usagers, arnaque et surtout manque d'entretien des bus privés... Tels sont les qualificatifs usités par les usagers pour décrire la situation des transports en commun en milieu urbain, surtout dans la capitale. Les usagers de ces moyens de transport ne cessent de crier haut et fort que rien ne va plus dans ce secteur vital. A titre d'exemple, nous avons pris un bus qui relie le centre d'Alger à une localité de l'est de la capitale. Ni confort ni sécurité sur la ligne : Place des martyrs-Boumaâti. Le problème de la surcharge est fréquent. Aucun parmi les habitués ne dit le contraire. « Voyez cette surcharge que le bus a du mal à contenir ! », se désole un passager. Effectivement, les gens s'entassent comme des « sardines dans une boite », comme dit l'expression populaire. Les banquettes sont dans un état lamentable et le plancher est complètement dégradé. « C'est un état normal pour un bus qui a été utilisé pendant plus de 18 ans », dira un autre passager. La plupart des bus garés ont une moyenne d'âge supérieure à 13 ans, les immatriculations font foi, a-t-on constaté sur place. La tension est montée d'un cran lorsque les usagers demandent au conducteur de quitter la station puisque le bus était plein alors que le receveur continuait à héler d'autres clients et d'annoncer les différents arrêts du trajet. « Ils sont toujours comme ça, ils voient en nous des pièces de 20 DA (le prix du ticket) », a fait remarquer un passager. Malgré toutes ces contraintes, les citoyens ont-ils vraiment le choix ? « L'essentiel est de trouver un moyen de déplacement, nécessité oblige », affirme une femme, fonctionnaire. Dix minutes plus tard, le bus a démarré. Durant le trajet, le chauffeur a continué à « ramasser » les usagers, pour peu qu'on lui fasse signe de s'arrêter, même si le véhicule est plein à craquer. Les embouteillages compliquent davantage la situation, surtout lorsque des vendeurs à la sauvette accaparent les trottoirs et même des tronçons de la route, comme c'est le cas dans la localité de Boumaâti. « Je dois repasser mes vêtements », ironise une jeune dame à la fin du trajet, tellement elle a été « compressée » à l'intérieur du bus. Les usagers de ce transport en commun trouvent que le déplacement dans les bus appartenant au secteur public, à savoir ceux de l'Entreprise de transport urbain et suburbain d'Alger (ETUSA) est beaucoup mieux. Par contre, ils déplorent le fait que celle-ci n'assure pas toutes les destinations. Avec ses 619 bus (données de 2010) cette entreprise assure 54 lignes dont 39 urbaines. « Je me sens très en sécurité dans les bus de l'ETUSA. Je sais que ses mécaniciens font des révisions quotidiennes pour les bus », a indiqué un homme d'un certain âge. Plusieurs passagers ont mis en valeur le confort des bus et la qualité des services de l'entreprise publique. 20 000 BUS REPRESENTENT UN DANGER DE MORT Selon les déclarations du président de la Fédération nationale des transporteurs de voyageurs, « 30% des 70 000 bus de transport en commun, assurant les différentes lignes à l'échelle nationale, doivent être remplacés ». Avec un petit calcul, on déduit que plus de 20 000 bus en activité sont vétustes ! Le changement des bus en mauvais état permettra de préserver la sécurité des usagers et l'amélioration du service. Dans la situation actuelle, l'on craint que le cycle infernal des accidents de la route ne se poursuive et fasse encore plus de victimes. Sur ce point précis, un usager dira : « La modernisation du parc automobile ne bénéficiera pas uniquement aux citoyens mais également aux propriétaires. Cela leur évitera les pannes récurrentes et les retards fréquents », a-t-il ajouté. Les usagers abordés se demandent en quoi consiste le rôle des services du contrôle technique. Outre le risque que présente le véhicule, il en est un autre : celui des conducteurs. « Des chauffeurs présentant des maladies chroniques, d'autres inaptes pour diverses raisons exercent cette activité et mettent en péril la vie des citoyens », a souligné une cliente. En effet, des conducteurs impatients n'hésitent pas à slalomer aux dépens de leur sécurité et celle des usagers surtout pendant les heures de pointe où les embouteillages atteignent leur apogée. L'excès de vitesse pour rattraper le retard perdu dans les bouchons représente un danger de mort certain. Evoquant la mesure d'interdiction de circulation des véhicules de transport de voyageurs âgés de plus de dix ans à Médéa, les usagers estiment que « c'est une bonne chose ». Certains ne sont pas de cet avis : « Cette décision ne doit pas être généralisée puisqu'il y a des transporteurs qui entretiennent régulièrement leurs véhicules », a indiqué un chauffeur de bus. Selon les parties concernées plus de 94 % des accidents de la route sont imputables au facteur humain. Concernant l‘indice d‘insécurité sur les routes, la wilaya d'Alger se classe en première position suivie par les wilayas de Sétif et de Biskra. Afin de réduire les risques d'insécurité, la DGSN a élaboré un plan préventif : dans ce cadre, 1.066 cours théoriques ont été dispensés au sein des établissements éducatifs et d'enseignement, 876 cours pratiques prodigués au sein des pistes d'éducation routière et 70.616 actions de sensibilisation en direction des usagers de la route, durant l'année 2011, ont été réalisés, selon la DGSN. CE QUE DIT LA LOI Le transport est un droit : la loi définit le service public de transports terrestres comme devant « viser à rendre effective la satisfaction des besoins des citoyens en matière de transport dans les conditions les plus avantageuses pour la collectivité nationale et pour les usagers en termes de sécurité, de disponibilité des moyens de transport, de coût, de prix et de qualité de service ». Quant aux conditions d'exploitation, elles sont claires : « Pour accéder à la profession de transporteur, les opérateurs privés doivent répondre à des conditions de sécurité, de qualification professionnelle, de moyens de transport, de conditions d'exploitation et de travail et de qualité de service ». Est-ce vraiment le cas ? Loin s'en faut. Pour plus d'informations à ce sujet, nous avons contacté le ministère des Transports mais son service de communication ne répond pas.