Le rappeur Oxmo Puccino et ses quatre musiciens ont fait sensation en cette soirée de jeudi dernier à la salle Ibn Zaydoun de l'office de Riad El Feth (OREF), dans le cadre du 11e festival culturel européen à Alger. Cette formation a donné une représentation d'une extrême originalité, alliant un récital de poésie au chant rap. Oxmo Puccino de son vrai nom Abdoulaye Diarra (né en 1974 à Ségou, Mali), est un rappeur français d'origine malienne. La principale singularité d'Oxmo Puccino réside dans son écriture, basée sur les métaphores et les phrases chocs. Ce lien à la chanson française lui a valu le surnom de « Black Jacques Brel ». Vous êtes un rappeur mais vous n'excellez pas dans le genre rap « ordinaire ». C'est-à-dire vous êtes un artiste particulier qui sait allier le rap à la poésie. Parlez-nous de cette création ... Pour moi, le rap constitue la version la plus moderne de la variété française. Chaque musique est contrainte d'évoluer, à être fusionnée. Bien évidemment, le rap n'y échappe pas. Le rap traditionnel a donné naissance à la musique actuelle. Vos textes sont basés sur les métaphores et les phrases chocs. On vous compare souvent à Jacques Brel. Est-ce pour vous un sentiment de fierté ou cela vous embarrasse-t-il plutôt ? Foncièrement, j'éprouve un sentiment de fierté. Mon objectif, par-dessus tout, est d'essayer d'intéresser les gens. J'emploie des phrases chocs mais toujours douces dans le but est d'échanger un point de vue ou de faire part d'une remarque. En écoutant vos chansons, on constate une bonne maitrise de la langue française, pourtant vous êtes d'origine malienne… L'un n'empêche pas l'autre. Je dois admettre que c'est grâce à mon père qui était serrurier que j'ai appris à lire. C'est lui qui m'a inculqué dès mon jeune âge la littérature. Il a su me transmettre cette passion. On décèle dans vos textes des notions tragiques parfois même alarmistes. Etes-vous réellement pessimiste dans votre vie quotidienne ? Je ne suis pas pessimiste. Par contre, je positive une réalité qui a le pouvoir de nous rendre pessimiste. Je propose une vision nouvelle, moins dure et plus belle. Vous avez enregistré en 1997 une compilation avec Booba qui a rencontré un vif succès. Parlez-nous de cette collaboration ... Absolument. Il s'agit du morceau « Pucc fiction », réalisé en collaboration avec Booba. Ce titre rencontre réellement un grand succès dans le milieu underground et est considéré aujourd'hui comme un des morceaux les plus forts du rap français. C'est un genre de musique spontané et clair. J'ai apprécié ma collaboration avec Booba. Vous avez fait sortir en 2006 un album réalisé dans des sonorités jazz. Est-ce le début d'une nouvelle expérience musicale ? Parfaitement. Après la réalisation des mixtape et de nombreuses collaborations avec différents rappeurs et autres artistes sur divers projets. Puis en 2006, j'accepte volontiers une proposition d'enregistrer avec des musiciens un album jazz. Cet opus est sorti chez « Blue note », célèbre label de jazz. J'ai collaboré dans cet album avec le groupe « The jazzbastards ». Dans cette production, je me suis inspiré de la vie de la chanteuse Billie Holiday. Tel un véritable touche à tout, vous avez fait une courte apparition dans un des films de Luc Besson. Comment avez-vous trouvé cette expérience et comptez-vous récidiver ? Je suis honoré de participer à la réalisation de ce film. Une expérience qui a indubitablement enrichi mes connaissances dans la vie en général. J'ai adoré. Je viens de participer à un court métrage « Rubicube » réalisé par Elise Vogel. Je campe le rôle d'un instituteur. Selon certaines indiscrétions, on vous compare souvent à votre frère Mamoutou Diarra qui est l'international français de basket-ball. Qu'en est-il ? A vrai dire, nous avons la même manière de voir les choses. Cependant, nous ne nous ressemblons pas sur le plan physique. Aujourd'hui que vous occupez une place importante dans le champ musical français, ne songez-vous pas à aider les jeunes artistes qui émergent au Mali ? Cela fait deux ans que je ne suis pas retourné au Mali. Je n'ai pas eu l'occasion concrète de collaborer avec des artistes maliens mais je surveille quelques uns de loin. Je pense au potentiel d'Habib Merouane. Des projets en vue ? Je compte entamer durant la saison estivale une tournée au Canada, France, Maroc, la Réunion. Je compte aussi faire sortir un clip réalisé par Kim Chapiron.