Le président sortant Nicolas Sarkozy, 57 ans, le talonne de près (27,18%). Les deux hommes s'affronteront en finale le 6 mai. Marine Le Pen, 43 ans, la candidate du Front national, a déjoué tous les pronostics du scrutin qui a vu une forte participation des électeurs (plus de 80%). Avec ses 17,90% de voix, loin du candidat de Front de gauche Jean-Luc Mélenchon, 60 ans (11,11%), et du président du MoDem, François Bayrou (9,13%), elle s'annonce comme la détentrice des clés de ce duel et ...faiseuse de rois. Les chancelleries, qui assistent impuissantes à une poussée des partis d'extrême-droite en Europe, jugent préoccupant le score jamais réalisé du FN. Certains analystes estiment qu'il « est un avertissement fatidique pour toute le Vieux continent » qui subit une politique d'austérité imposée par Angela Merkel, la chancelière allemande et son « ami » Sarkozy. François Hollande, qui est crédité de 53 à 56% des intentions de vote, selon des sondages BVA et Ipsos, croit en ses chances de devenir, à partir du 18 mai, le premier président de gauche depuis 17 ans. Nicolas Sarkozy, qui n'a de chance de se succéder à lui-même à l'Elysée qu'avec les voix de l'extrême-droite et du MoDem, refuse d'abdiquer. Même s'il sait que Marine Le Pen risque de ne pas donner de consigne de vote lors du meeting qu'elle organisera place de l'Opéra à Paris, le 1er mai, à l'occasion de la fête de Jeanne d'Arc, pour « analyser » à voix haute ce premier tour. « La bataille de France ne fait que commencer. Rien ne sera plus jamais comme avant », dit-elle. Ses lieutenants laissent croire qu'elle veut capitaliser son succès pour l'après-6 mai, dont les législatives des 10 et 17 juin prochain. « Le prochain président de la République n'aura que très peu de pouvoir pour gouverner. Il lui faudra une majorité », affirme Louis Aliot, vice-président du FN, souhaitant une « implosion » de l'UMP et une « recomposition » de la droite autour de Le Pen. Hier, premier jour de leur campagne électorale, les premiers mots de Sarkozy et de Hollande ont ciblé les électeurs de Le Pen. « Il y a des électeurs qui ont pu aller vers ce vote par colère. Ce sont ceux-là que je veux entendre », déclare le candidat du Parti socialiste, maintenant ainsi sa stratégie de rassemblement et ce dans l'optique de terrasser le 6 mai son rival. « Il y a un vote Front National qui est un vote d'exclusion », explique Martine Aubry, la première responsable du PS. Comme la plupart des militants de son parti, elle estime que « la victoire » de leur candidat est « là » mais personne n'ose dire que le scrutin est « plié ». Certains se demandent déjà comment faire après un quinquennat destructeur, une extrême-droite plus puissante que jamais et un patronat pas disposé à mettre la main à la poche. « Il faut respecter le vote des électeurs, notre devoir c'est de les entendre. Il y a ce vote de crise qui a doublé d'une élection à l'autre, c'est à ce vote de crise qu'il faut apporter une réponse », estime son rival de l'Union de la majorité populaire (UMP). Plombé par son impopularité et par la crise économique et financière, optera-t-il pour un discours « lepéniste » ? « J'appelle tous les Français qui mettent l'amour de la patrie au-dessus de toute considération partisane ou de tout intérêt particulier à s'unir et me rejoindre », dit-il, affirmant comprendre les « souffrances » et « angoisses » exprimées à travers un « vote de crise ». « La France ne peut pas accueillir tous les immigrés », déclare, juste après, Alain Juppé, son chef de la diplomatie, avant que Claude Guéant, son collègue de l'Intérieur, ne relance son discours sur la sécurité et l'Islam. Et les électeurs du « centriste » Bayrou ? Personne n'en fait état. En 2007, il avait refusé de trancher entre la droite et la gauche. Fera-t-il autant cette fois quand il recevra les réponses de Sarkozy et Hollande à ses questions ? Possible. Redoutant une chute libre le 6 mai, synonyme d'une retraite de la vie politique, Sarkozy opte pour la provocation. Il propose à Hollande trois débats télévisés entre les deux tours. Objectif de ces débats-bouées de sauvetage : montrer aux Français que le programme du socialiste les « conduirait sur le chemin de l'Espagne et de la Grèce » et tenter de susciter « une union nationale » contre une « union de la gauche ». Comme attendu, Hollande refuse de se plier à cette demande. « Un seul débat, pas plus », lui dit-il.