Hafsa commence à écrire des poèmes dès son jeune âge, parce qu'elle est visitée par la grâce et « habite une grande maison toujours éclairée : la poésie ». « L'aube nous vêt d'une robe blanche » est un recueil qui révèle un auteur pétri de qualités littéraires. La première réside dans la simplicité de son style. Hafsa Saïfi écrit simple, même lorsqu'elle évoque un thème aussi profond et complexe que la vie, l'amour et l'ennui. Les adeptes du verbe n'ont pas besoin de dictionnaire pour comprendre le sens et la portée de ces poèmes. Il suffit d'avoir une âme de poète pour saisir le sens des mots avec lesquels Hafsa s'exprime. Elle énonce ce qu'elle pense avec un langage simple et dépouillé d'emphase. Parce qu'elle possède l'art d'agencer avec beauté et simplicité des mots pour donner naissance à de très beaux vers. Son poème « Je veux vivre un instant seulement » illustre la parfaite maîtrise de la poésie dont jouit la poétesse, qui aspire à habiter les cieux. Dans ce poème, elle désire se poser « en royal pèlerin sur un pont aérien, dans l'espace » pour mieux « recommencer mon enfance dans une saison introuvable ». Incomprise sur terre, la poétesse rêve d'élire domicile dans le firmament pour mieux se gausser de nos fatras. Pour mieux nous « gaver » de poèmes nourriciers. Sur le plan stylistique, Hafsa n'accorde pas d'importance à la rime. Son souci premier est d'abord de peindre la réalité, telle qu'elle la conçoit. Elle explique dans l'avant-propos ce qu'est la poésie pour elle. « Je viens d'une génération où le français n'est pas langue maternelle, mais langue étrangère privilégiée qui commence à reprendre sa place d'antan. Comme mon français l'indique, mon élan vers la perfection de cette langue n'est qu'une aspiration », dit-elle. Cela étant, Hafsa Saïfi a réussi, malgré quelques difficultés sémantiques, à écrire des poèmes d'anthologie. Jugeons-en. « A l'heure/ Où l'aurore/ Fait le bilan des corps/ Noyés dans les flaques/ Des pluies tardives/ Des ombres gisant/ Sur les nappes du vide/ S'étirent difficilement/ Pour se mettre debout/ Leur cœur tremble à l'impatience/ De la fuite ». Par ailleurs, Hafsa Saïfi n'excelle pas seulement dans la poésie. Elle maîtrise aussi parfaitement la poésie en prose. Ses poèmes en prose rappellent, par leur beauté poétique et leur thématique « Spleen de Paris » de Charles Baudelaire. Le texte « Ce premier matin du monde » dénote de la veine poétique de la jeune poétesse. « Je n'ose pas y croire, ce premier matin de liberté découpe la lumière en aubes nouvelles. Le parfum de l'espoir remplit le ciel de juillet. De plus en plus, les revenants arrivent ivres de fatigue, les mains posées sur plaies qui saignent encore. Ils marchent vers nous baisant à chaque pas les lèvres de la terre. Les volontaires déverrouillent les portes fermées des huttes qui tremblent. Les femmes déformées par leur grossesse chantent pour le plaisir de chanter. Les vieux que l'on croyait éteints s'éveillent de leur torpeur et hurlent à pleins poumons : Liberté ». Cela se passe de tout commentaire. il est à souligner que Hafsa Saïfi est née en 1987 à Aïn Defla. Elève ingénieur, elle passe son temps libre à taquiner la muse. Elle estime, toutefois, qu'être poète, c'est d'abord, et avant tout, regarder vers le profil de l'équité, anticiper les droits de l'homme, vouloir restituer un peu de beauté, de poudre de rêve et d'images pacifiantes. Djamel O. « L'aube nous vêt d'une rose blanche », poésie, collection Ilhem, Editions Lazhari Labter, 97 pages, prix public : 450 DA